Dans les coulisses du parlement belge - janvier 2023

En ce début d’année 2023, une série de nouveaux avis ont été demandés à AVOCATS.BE, notamment en matière pénale. AVOCATS.BE sera entendu en commission de la justice de la Chambre au sujet d’une proposition de résolution visant la création de cabinets multidisciplinaires composés d’avocats salariés.


I. Cabinets multidisciplinaires – avocats dédiés

a. Textes

  • Proposition de résolution PS visant à garantir de manière effective le droit d'accès à la Justice par la création de cabinets multidisciplinaires composés d'avocats salariés et par la revalorisation de la rémunération et une révision des conditions de rémunération des avocats pratiquant l'aide juridique de deuxième ligne (DOC55 2611).

b. Développements

La commission de la Justice a invité AVOCATS.BE à une audition au sujet de la proposition de résolution visant à garantir de manière effective le droit d'accès à la Justice par la création de cabinets multidisciplinaires composés d'avocats salariés et par la revalorisation de la rémunération et une révision des conditions de rémunération des avocats pratiquant l'aide juridique de deuxième ligne.

Quentin Rey représentera AVOCATS.BE à cette audition qui aura lieu le 24 janvier 2023. 

Sont également invités à cette audition : l’O.V.B., le C.S.J., les chercheuses de l’U.L.B. Emmanuelle Debouverie et Elise Dermine, le cabinet Casa legal ainsi que deux associations flamandes d’aide au justiciable.

Le projet de cabinets d’avocats multidisciplinaires dédiés à l’aide juridique ne fait pas l’unanimité au sein des barreaux francophones et germanophone.

En effet, diverses questions interpellent, telles notamment le risque d’ingérence étatique, l’indépendance des avocats salariés, la concurrence avec les avocats praticiens de l’aide juridique non intégrés dans ces cabinets multidisciplinaires, et/ou le financement de tels projets.

AVOCATS.BE estime que d’autres pistes pourraient être explorées dans le cadre de la réflexion initiée par le projet de résolution.

 

II. Dispositions diverses en matière d’organisation judiciaire - article 186 du Code judiciaire – diminution des lieux de justice

a. Texte

  • Loi du 26 décembre 2022 portant des dispositions diverses en matière d'organisation judiciaire II (M. B. du 12 janvier 2023).

b. Développements

La loi du 26 décembre 2022 portant des dispositions diverses en matière d'organisation judiciaire II a été publiée au moniteur belge du 12 janvier 2023. 

Cette loi contient notamment des modifications à l’article 186 du Code judiciaire : la liste limitative d’affaires susceptibles de relever de la compétence exclusive d’une ou de plusieurs divisions est supprimée et la possibilité de centraliser des phases de procédure au sein d’une division est ajoutée.

En outre, la garantie que les règlements de répartition ne peuvent en aucun cas avoir pour effet de supprimer des lieux d’audiences existants a disparu sauf pour les tribunaux de police.

Pour rappel, AVOCATS.BE s’est opposé à la modification de l’article 186. Michel Kaiser a été entendu lors des auditions en commission de la justice et a sévèrement critiqué le projet de modification tout comme d’ailleurs d’autres acteurs de la justice (le C.S.J. et le C.C.M. notamment). Voir actualités du mois de décembre

 

III. Mention des voies de recours et liste des barreaux 

a. Textes

  • Loi du 26 décembre 2022 relative à la mention des voies de recours et portant dispositions diverses en matière judiciaire (M. B. du 30 décembre 2022).
  • Arrêté royal du 26 décembre 2022 fixant le modèle de fiche informative conformément à l'article 780/1, alinéa 5, du Code judiciaire (M. B. du 30 décembre 2022).
  • Article d’Antoine Gillet (avocat au barreau du Brabant wallon et membre de la commission de droit et pratique judiciaires publié dans la lettre du barreau du Brabant wallon).

b. Développements

La loi relative à la mention des voies de recours et portant dispositions diverses en matière judiciaire a été publiée au moniteur belge du 30 décembre 2022.

Pour rappel, la commission « droit et pratique judiciaires » d’AVOCATS.BE avait eu l’occasion de rendre un avis sur l’avant-projet de loi et certaines de ses observations avaient été prises en considération. 

Cette loi insère dans le Code judiciaire un article 780/1 qui prévoit que, dans les cas expressément prévus par la loi, est jointe au jugement en matière civile une fiche informative (dont le modèle est publié dans un arrêté royal publié le même jour que la loi) dans laquelle il est fait mention, pour chaque partie, des données suivantes :

a) les voies de recours d'appel, d'opposition ou du pourvoi en cassation qui sont d'application contre le jugement ou l'absence de ces voies de recours;
b) la dénomination et l'adresse de la juridiction compétente pour connaître de ces recours;
c) la manière d'introduire ces recours;
d) le délai dans lequel ces recours doivent être introduits avec mention des motifs légaux de prolongation du délai;
e) l'acte juridique qui fait courir le délai;
f) un avertissement explicite que la partie qui utilise la procédure à des fins manifestement dilatoires ou abusives peut être condamnée à une amende sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés et au paiement de l'indemnité de procédure.
Le cas échéant, la fiche informative mentionne également la possibilité de tierce opposition avec les mêmes données.

Cette loi fait suite à deux arrêts récents de la Cour constitutionnelle (arrêt 23/2022 du 10 février 2022 et arrêt 92/2022 du 30 juin 2022).

A noter que l’article 7 de la loi actualise la liste des barreaux pour tenir compte des fusions et changements de nom intervenus.

 

IV. Réforme du Conseil d’Etat 

L’avant-projet de loi portant réforme du Conseil d’Etat a été transmis à la section législation du Conseil d’Etat à laquelle AVOCATS.BE a transmis ses observations.

A noter qu’une carte blanche intitulée « Pourquoi la réforme du Conseil d’État doit renforcer les garanties de l’État de droit? » a été publiée dans la Libre Belgique du 7 janvier 2023. Cette carte blanche a été signée par 90 avocats spécialisés en droit public dont 8 bâtonniers et le président d’AVOCATS.BE.

 

V. Les échanges préalables à l'audience entre magistrats à la Cour de cassation – question/réponse écrite

Le Ministre de la justice a répondu à une question écrite de la députée Sophie Rohonyi (Défi) concernant la pratique des échanges préalables entre magistrats à la Cour de cassation révélée par l’arrêt Manzano Diaz de la Cour européenne des droits de l’homme.

Question écrite de la députée Sophie Rohonyi :

« Le 26 juillet 2022, le journal La Libre presse rapportait l'existence d'une procédure occulte et peu désirable qui aurait été mise en place au sein de la Cour de cassation. 

Selon l'avocat François Koning, des contacts seraient en effet pris régulièrement, préalablement aux audiences, entre l'avocat général et les juges de cassation. Le problème tiendrait en réalité au fonctionnement en tant que tel de la Cour, qui rend généralement ses arrêts le même jour où les affaires sont plaidées et ce, même si le reste de la procédure est principalement écrite. Parce que les juges s'imposent l'obligation de rendre les arrêts le jour même de l'audience, ils sont obligés de rédiger un projet d'arrêt avant même que l'audience ait lieu. C'est là que l'avocat général intervient puisqu'il a la possibilité de faire alors des suggestions au juge tout en ayant avec lui des échanges de vues quant aux solutions à envisager, avantage que la partie adverse, elle, n'a pas. Dans certains cas, ce serait même l'avocat général qui rédigerait, lui-même, les projets d'arrêts, ne laissant plus qu'aux juges le soin de s'y rallier. Maître Koning préconise ainsi une réforme de cette procédure pour faire en sorte que la Cour ne puisse plus établir de projets d'arrêt avant l'audience et, surtout, qu'il soit fait interdiction à l'avocat général d'avoir des contacts avec les juges avant l'audience. 

1. Avez-vous connaissance de cette pratique ? 
2. Estimez-vous qu'elle soit désirable ou qu'elle pourrait être améliorée ? 
3. Quelle est votre position sur les griefs adressés à la Cour de cassation par François Koning ? »

Réponse écrite du Ministre de la justice: 

« La procédure suivie devant la Cour de cassation est réglée par l'article 1104 du Code judiciaire. Cet article prévoit que, lors de la transmission qui lui est faite du dossier par le greffier, le premier président désigne un magistrat du siège en qualité de rapporteur (al. 1er) et que celui-ci, son examen terminé, dépose le dossier au greffe (al. 2) ; l'article 1105 poursuit que le greffier transmet le dossier au procureur général, qui se charge de l'affaire ou désigne un des avocats généraux à cette fin (al. 1er). Il est important d'indiquer que l'avocat général à la Cour de cassation, n'exerce en règle pas l'action publique, il n'est pas une partie au procès et il n'est l'adversaire d'aucune des parties mais a pour tâche d'assister la Cour de cassation et de veiller au maintien de l'unité de la jurisprudence en observant la plus stricte objectivité. 

Si la procédure critiquée par Maître Koning dans l'article était modifiée, le parquet cassation ne pourrait plus remplir qu'avec moins d'efficacité son rôle d'amicus curiae spécialement chargé de veiller au maintien de l'unité de la jurisprudence ; un risque de ralentissement du traitement des affaires pourrait apparaître et le caractère équitable de la procédure en cassation s'en trouverait altéré. 

La Cour de cassation a fait savoir qu'elle n'avait jamais reçu de remarques à ce sujet venant des avocats et qu'à l'occasion des visites faites aux chefs de corps de la Cour de cassation par les présidents successifs de l'OVB, de l'Ordre des barreaux francophone et germanophones (avocats.be) et des barreaux néerlandophone et francophone de Bruxelles, la procédure prétendument litigieuse n'a à ce jour jamais été abordée ».

AVOCATS.BE entend réagir aux propos du Ministre de la justice. L’absence de prise de position du barreau ne constitue en aucun cas un accord tacite avec cette pratique. 

 

VI. Le contrôle de la procédure de règlement collectif de dettes par les tribunaux du travail 

La Commission d’avis et d’enquête réunie du Conseil supérieur de la Justice a rendu son rapport sur l’audit du contrôle de la procédure de règlement collectif de dettes par les tribunaux du travail. Il est le résultat de plus de 80 interviews, d’analyses statistiques sur près de 40.000 dossiers et du contrôle in situ de 115 dossiers de RCD.

Cet audit a impliqué les neuf tribunaux du travail. L’objectif était d’examiner comment ceux-ci veillent au déroulement de la procédure, notamment, au stade de la sélection et de la désignation des médiateurs de dettes mais également sur le plan du traitement administratif et du contrôle des dossiers. 

Les principales constatations et recommandations de cet audit peuvent se décliner en 4 axes : 

1. Tous les tribunaux du travail n’exercent pas une politique de sélection et de désignation des médiateurs de dettes ; lorsqu’une telle politique existe, celle-ci n’est pas toujours uniformisée au sein des différentes divisions et elle n’est pas toujours mise par écrit. Le CSJ estime que chaque dossier mérite un suivi personnalisé et doit faire l’objet d’un monitoring continu. 

2. Concernant le traitement administratif et contrôle des dossiers de RCD : le CSJ recommande aux tribunaux du travail de formaliser par écrit les processus encadrant le traitement administratif et le contrôle des dossiers RCD. Il est également essentiel de monitorer en continu le respect des différents délais légaux, d’opérer un contrôle systématique des demandes de taxation des frais et honoraires des médiateurs de dettes et de veiller à la complétude du rapport annuel. 

3. Il faut travailler sur la formation obligatoire des médiateurs de dettes et leur agréation.

4. Concernant le registre central des RCD (dont le développement et la gestion ont été confiés à l’OVB et AVOCATS.BE) : le CSJ rappelle que la mise en place et la gestion de ce registre devraient relever des tâches des autorités judiciaires. Le CSJ regrette la sous-traitance de ces tâches aux frais de l’autorité publique. Indépendamment de ce constat, des ressources suffisantes devront impérativement être allouées au développement du registre, à sa maintenance ainsi qu’à la formation des membres de l’ordre judiciaire à son utilisation.

Laurence Evrard, 
Responsable des actualités législatives

Crédit photo : Oakenchips, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons

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Laurence
Evrard
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