Les trois analyses de risques nationales résumées par la CTIF

Avant d’entamer ce Fil blanc, la Commission anti-blanchiment vous informe que deux des documents mis à votre disposition sur l’extranet d’AVOCATS.BE ont été mis à jour. Il s’agit des slides des Universités d’été (la version 2024 est à présent en ligne) et du manuel retraçant toutes les obligations de l’avocat en termes de prévention (complété essentiellement en ce qui concerne le volet pénal). Bonne lecture.


Le Fil blanc : le Classique

Le Fil blanc aborde chaque mois, par le biais d’un article qui se veut court et lisible, un thème spécifique relatif à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, pour vous informer et vous rappeler que l’assujettissement est plus rapide que beaucoup ne l’imaginent. 


Les trois analyses de risques nationales résumées par la CTIF

Les risques, socle de la lutte anti-blanchiment.

Ils doivent être analysés et pris en considération à tous les niveaux : supranational, national, sectoriel et, bien sûr, de vos cabinets et de vos dossiers.

La Belgique a ainsi adopté cette année trois analyses de risques nationales, relatives au blanchiment de capitaux, au financement du terrorisme et au financement de la prolifération des armes de destruction massive.

Elles comportent des informations sensibles, raison pour laquelle elles n’ont pas été rendues publiques. Vos bâtonniers en prendront connaissance en leur qualité d’autorité de contrôle au sens de la loi du 18 septembre 2017.

Ces analyses contiennent toutefois certaines informations intéressantes, susceptibles de guider les entités assujetties dans leur propre perception des risques. La CTIF en a donc publié un résumé : https://www.ctif-cfi.be/index.php/fr/ressources/ml-tf-risk-assessment.

En voici les éléments essentiels :

Analyse de risques blanchiment

L’usage de cash reste prépondérant : « (b)eaucoup de secteurs, produits et services ont encore recours aux espèces, ce qui explique des scores élevés en termes de menace de blanchiment. C’est particulièrement le cas des commerçants en matières précieuses, vieux métaux et câbles de cuivre, du secteur Horeca, des commerçants en véhicules d’occasion, du secteur de la construction, du nettoyage industriel, des car wash, night shops, des bijoutiers/horlogers, des passeurs de fonds, des systèmes de transfert de fonds de type hawala, des commerçants en antiquités, de la prostitution et du secteur des loisirs (clubs de sport et jeux de hasard). ».

La circulation des espèces est souvent rendue possible grâce à des professionnels du blanchiment, notamment grâce à des techniques de compensations.

Certaines opérations de blanchiment sont facilitées « grâce à l’intervention de professionnels du chiffre, de conseillers fiscaux et de notaires ». Des constructions juridiques fictives et des sociétés dormantes sont créées et utilisées pour du blanchiment de capitaux, souvent en combinaison avec de la fraude fiscale et sociale, parfois avec une armée d’hommes de paille pour les gérer.

Les investissements immobiliers sont cités comme techniques de blanchiment (ventes avec plus-value importante après rénovations financées avec de l’argent illicite). Sont également utilisées certaines valeurs refuges (diamants, bijoux, métaux précieux,…), les monnaies virtuelles, et des IBAN virtuels (en « BE » mais utilisés par des personnes ou entités qui ne sont pas clients d’une institution bancaire belge).

Les clubs de football sont cités comme ayant recours à des montages souvent frauduleux.

Depuis que les établissements financiers ont délaissé cette activité, sont en outre apparus des loueurs de coffres-forts hors secteur financier, et dès lors non supervisés, ce qui est illégal.

Analyse de risques financement du terrorisme

La CTIF indique dans son résumé qu’il existe deux types de financement du terrorisme :

« - d’une part le micro-financement, qui recouvre l’autofinancement de cellules terroristes ou de loups solitaires (…) ;

- et d’autre part le macro-financement, qui recouvre le financement structurel du terrorisme. »

Le terrorisme peut être financé notamment par :

- le trafic de drogue et de stupéfiants. « Certains criminels, attirés par l’appât du gain, monnaient dorénavant leurs services. Cette évolution vers le « crime en tant que service » en combinaison avec la force de frappe financière de ces organisations criminelles, a contribué à une augmentation de la violence (qui) affecte aujourd’hui aussi la police, la justice, les journalistes et le monde politique » ;

- le financement de groupes ou de mouvements extrémistes qui « mêlent à fois des sources telles que le financement participatif ou les dons, et des sources illégales, par le biais d’infractions sous-jacentes comme le trafic de stupéfiants, d’armes, le vol ou le commerce de marchandises interdites » ;

- mais aussi le trafic d’œuvres d’art et d’antiquités ou biens de grande valeur ; la petite criminalité ; le trafic et la traite d’êtres humains (y compris le trafic de migrants) et la collecte de dons et les soutiens familiaux, les activités professionnelles officielles servant à des dons ou sponsorings de terroristes.

« Les moyens utilisés sont essentiellement :

- les espèces, issues de collectes de dons, de soutiens familiaux et d’activités criminelles (génératrices de cash) ;

- le transfert international de ces espèces via des services de transfert de fonds de type money remittance, le transport transfrontalier d’espèces par des personnes ou dans des colis, les systèmes de paiement de type hawala ;

- les nouveaux systèmes électroniques de transferts (…), les IBAN Virtuels, les cartes de crédit prépayées et les monnaies virtuelles. » 

Analyse de risques en matière de financement de la prolifération d’armes de destruction massive

Il est constaté qu’ « (a)ucune preuve suggérant que les entités réglementées en Belgique participent au financement d’activités de prolifération et qu’aucun lien direct avec le financement de la prolifération n’ai été rencontré (…) ».

Toutefois, l’exercice d’activités sur le marché financier international peut constituer un risque de financement de la prolifération.

Avec le Port d'Anvers comme plateforme logistique internationale et la présence d’institutions financières jouant un rôle central au sein du système financier international, la Belgique est exposée aux risques de financement de la prolifération.

La Belgique estime cependant que les différentes menaces et vulnérabilités identifiées dans cette analyse « sont la plupart du temps contrebalancés par des mesures d’atténuation permettant de diminuer les risques résiduels sans pour autant les supprimer complètement. »

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Ces trois analyses de risques seront prises en compte dans la mise à jour de l’analyse sectorielle du Barreau datant de 2019.

Marjorie Dedryvere
Juriste interne AVOCATS.BE et en charge de la commission anti-blanchiment d'AVOCATS.BE

A propos de l'auteur

Marjorie
Dedryvere
Responsable de la Commission anti-blanchiment

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