La Cour E.D.H. refuse le bénéfice des articles 6 et 8 de la Convention à deux avocats ayant contesté l’impartialité d’un magistrat avant d’être eux-mêmes exclus de la procédure par ce dernier pour outrage à la cour et comportement inapproprié. Le juge Krenc dénonce le risque de dérive arbitraire.
L’U.E. adopte un nouveau train de sanction contre la Russie interdisant la prestation de certains conseils juridiques. Le C.C.B.E. s’organise pour réagir.
Le Conseil approuve la directive sur un meilleur équilibre hommes-femmes dans les conseils d’administration des sociétés cotées en bourse.
La Commission européenne propose deux nouvelles législations en matière de responsabilité civile du fait des produits numériques.
La Cour E.D.H. lance un nouvel outil de recherches et de partage de connaissances sur sa jurisprudence en ligne
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I. PROFESSION D’AVOCAT
- C.E.D.H. – Absence de recours contre une décision de révocation de l’avocat en cours d’instance – Irrecevabilité – Opinion dissidente du juge Krenc – 4 octobre 2022
Par un arrêt du 4 octobre 2022, la Cour E.D.H. a jugé que les articles 8 (protection de la vie privée) et 6(1) (droit au procès équitable en matière civile) de la Convention E.D.H. n’étaient pas applicables contre la révocation de deux avocats en cours de procédure - pour « comportement inapproprié, mauvaise foi et outrage à magistrat » ainsi que pour « comportement irresponsable et malhonnête ».
En l’espèce, deux avocats avaient contesté l’impartialité d’un même magistrat avant d’être eux-mêmes exclus de la procédure par ce dernier pour outrage à la cour et comportement inapproprié. Leurs recours contre ces décisions de révocation avaient par la suite été rejetés par les juridictions nationales.
S’agissant du droit à la vie privée, la Cour a considéré que le grief tiré de l’article 8 de la Convention était irrecevable, estimant que l’atteinte n’avait pas dépassé un seuil de gravité tel que la décision de révocation soit constitutive d’une ingérence dans la jouissance des droits tirés de l’article 8.
S’agissant du droit au procès équitable, la Cour relève d’abord que la décision litigieuse ne revêt pas un degré de sévérité suffisant pour relever du volet pénal de l’article 6. Elle considère ensuite que le litige relève bien du volet civil de l’article 6. Toutefois, elle estime qu’en l’espèce, la décision litigieuse relevait davantage d’une mesure de bonne administration de la justice que d’une décision à caractère disciplinaire et qu’elle s’était bornée, dans sa portée, à la procédure en cours sans pour autant empêcher les requérants d’exercer leur profession par ailleurs. Elle a ainsi conclu que l’article 6 n’était pas applicable à l’espèce.
Dans une opinion séparée jointe à l’arrêt, le juge belge, Frédéric Krenc, s’est opposé à cette conclusion. Il considère en effet cette solution (retenue à 4 voix contre 3) inquiétante, en ce qu’elle permet à un juge de révoquer un avocat sans lui offrir les garanties procédurales conférées par l’article 6 de la Convention – parmi lesquelles le droit à un juge indépendant et impartial et le droit à une décision motivée.
Il rappelle notamment que la révocation d’un avocat par un magistrat en cours d’instance n’est pas une décision anodine mais affecte au contraire directement la fonction de l’avocat dans le bon fonctionnement d’une justice démocratique, autant que les droits fondamentaux qu’il tient de la Convention en tant qu’individu.
La solution retenue par la Cour pourrait ouvrir la voie à des sanctions arbitraires et disproportionnées contre les avocats !
- Droits de la défense et accès à la justice – 8e train de sanctions contre la Russie – Interdiction de la prestation de services de conseils juridiques – 6 octobre 2022
Le 6 octobre 2022, le Conseil a adopté de nouvelles mesures de sanctions à l’encontre de la Russie, interdisant la prestation de services de conseils juridiques au gouvernement russe ainsi qu’aux personnes morales établies en Russie.
Le règlement n° 2022/1904 modifiant le règlement (UE) no 833/2014 concernant des mesures restrictives eu égard aux actions de la Russie déstabilisant la situation en Ukraine interdit en effet de « fournir, directement ou indirectement, des services d’architecture et d’ingénierie, des services de conseil juridique et des services de conseil informatique (a) au gouvernement russe ; ou (b) des personnes morales, des entités ou des organismes établis en Russie ».
Des exceptions sont toutefois prévues dans le cadre de services « strictement nécessaires à l’exercice des droits de la défense dans le cadre d’une procédure judiciaire et du droit à un recours effectif ».
Le règlement est entré en vigueur le 7 octobre 2022.
Action des barreaux européens :
Dès la publication du règlement, le secrétariat du C.C.B.E. a communiqué le document aux membres des comités « fiscalité » et « droits pénal » dans lesquels Jean-Luc Wuidard et François Koning représentent AVOCATS.BE. Le C.C.B.E. est par ailleurs en train de créer un nouveau « pool » d’expertise afin d’examiner les réponses à donner à cette inquiétante initiative.
II. LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT
- Réunion commune entre les conseils des Ordres de Bruxelles et Paris - Adoption d’une motion commune – 20 septembre 2022
A l’occasion de la réunion commune des deux Ordres, le paquet « lutte contre le blanchiment » était à l’ordre du jour et une motion commune a été adoptée.
Par cette motion commune, les deux Ordres invitent les colégislateurs à encadrer plus strictement les pouvoirs de l’A.M.L.A. à l’égard des organismes d’autorégulation et des informations couvertes par le secret professionnel des avocats ; à garantir l’autonomie et l’indépendance de la future A.M.L.A. ; et à fournir davantage de garanties au respect du secret professionnel.
- Rencontre avec la Commission européenne (DG FISMA) – 12 octobre 2022
Alors que Raluca Pruna, cheffe d’unité « (DG FISMA), avait déjà confirmé, le 7 septembre 2022 dans un courrier à AVOCATS.BE, la volonté de la Commission de protéger et faire respecter l'indépendance de la profession d’avocat comme principes structurants de l'état de droit, celle-ci a confirmé, à l’occasion d’une réunion qui s’est tenue le 12 octobre 2022 en présence de son équipe et de représentants du barreau de Luxembourg, que le contrôle des autorités publiques nationales devait s’entendre comme un contrôle « purement administratif » qui ne pourrait pas porter atteinte au secret professionnel des avocats.
Elle a précisé expressément que c’est dans ce sens restrictif que le libellé du texte de l’article 38 de la proposition de directive A.M.L. devait être compris.
- Proposition de règlement A.M.L. - Prochaines étapes
Les discussions entre rapporteurs parlementaires sur la proposition de règlement ont repris au début du mois de septembre 2022, en vue de l’élaboration d’amendements de compromis. Les amendements de compromis sur les chapitres 1 et 2 de la proposition de règlement (les articles 1 à 14) ont déjà pu être négociés. Les discussions se poursuivent sur les autres chapitres de la proposition de règlement.
Le vote sur le rapport relatif à la proposition de règlement A.M.L. par le Parlement devrait intervenir au cours de la dernière semaine de novembre ou de la première semaine de décembre 2022.
- Proposition de directive A.M.L. - Prochaines étapes
Les discussions parlementaires sur la proposition de directive ont repris en vue de l’élaboration d’amendements de compromis. Aucune information sur le contenu de ces discussions n’a filtré à ce jour.
Le vote de la proposition par le Parlement devrait intervenir d’ici la dernière semaine de novembre ou la première semaine de décembre 2022, soit en même temps que le vote sur les autres instruments législatifs du paquet A.M.L.
- Proposition de règlement A.M.L.A. - Prochaines étapes
Pour rappel, les discussions au niveau du Conseil sont clôturées, à l’exception du lieu d’établissement du siège de la future autorité.
Le Parlement devait quant à lui reprendre ses discussions, en vue de l’élaboration d’amendements de compromis, au cours du mois d’octobre 2022.
III. ETAT DE DROIT – DROITS HUMAINS
- Parlement – Article 7 – Rapport intérimaire sur les violations graves de l’état de droit par la Hongrie – 15 septembre 2022
Lors de la session plénière du 15 septembre 2022, le Parlement européen a adopté un nouveau rapport constatant la persistance de risques clairs de violations graves des valeurs européennes (visées à l’article 2 du T.U.E.) par lequel il qualifie la Hongrie de « régime hybride d’autocratie électorale ».
Par ce nouveau rapport, le Parlement constate une dégradation de la situation en Hongrie ; déplore l’incapacité du Conseil à obtenir des améliorations significatives en la matière ; et incite la Commission à une mise en œuvre plus ferme des outils de protection des valeurs européennes à sa disposition (tels que le règlement sur la conditionnalité du budget, le règlement sur l’utilisation des fonds et l’approbation du plan de relance de la Hongrie).
Prochaine étape :
Pour l’heure, ce rapport n’a pas été suivi d’effets au Conseil.
- C.E.D.H. – La Fédération de Russie cesse d’être partie à la Convention européenne des droits de l’Homme – 16 septembre 2022
Dans un communiqué de presse du 16 septembre 2022, la Cour E.D.H. a rappelé qu’à compter de cette date la Russie a cessé d’être partie à la Convention, mettant immédiatement fin aux fonctions du juge russe siégeant à la Cour. La C.E.D.H. conserve néanmoins sa compétence pour connaitre de toutes les affaires qui lui ont été soumises jusqu’à cette date.
Action des barreaux européens :
Lors des comités permanents des 24 juin 2022 et 7 octobre 2022, le C.C.B.E. a soulevé la question du maintien du barreau russe dans sa qualité de membre observateur du C.C.B.E. (qualité réservée aux barreaux des États Parties au Conseil de l’Europe), et plus largement de tout barreau relevant d’un État ne faisant plus partie du Conseil de l’Europe. En l’état des discussions, une procédure de suspension et d’exclusion est envisagée.
IV. ACCES A LA JUSTICE
- Conseil de l’Europe - Rapport de la C.E.P.E.J. 2022 sur l’efficacité de la justice – 5 octobre 2022
Le 5 octobre 2022, la Commission européenne pour l’efficacité de la justice (C.E.P.E.J.) du Conseil de l’Europe a publié son rapport d’évaluation des systèmes judiciaires européens 2022.
Ce rapport contient non seulement un rapport général détaillant la performance des systèmes judiciaires, de leurs budgets, de la situation des juges, des procureurs et des avocats, et de l'organisation des tribunaux des 44 États du Conseil de l’Europe participants et des 3 États observateurs de la C.E.P.E.J. (Israël, Maroc, Kazakhstan) mais également des fiches spécifiques par pays et une base de données interactive contenant l’ensemble des données collectées par la C.E.P.E.J. depuis 2010 ainsi que des commentaires accompagnant chaque donnée et différents tableaux de bord. Un nouveau tableau de bord concernant les juges et les procureurs a également été ajouté au rapport de cette année.
Ce rapport se fonde sur les données statistiques de l’année 2020.
Concernant la profession d’avocat, le rapport général souligne que « le nombre d’avocats continue d’augmenter en Europe, avec des différences importantes entre les États et les entités » (p. 84 et 85 du rapport général).
Pour la première fois, le rapport fournit également pour chaque pays une brève analyse des éléments les plus saillants du rapport.
Ainsi en Belgique (p. 25 et s. des fiches pays), il apparait qu’en 2020, le budget de l'aide judiciaire par habitant est nettement supérieur à la médiane du Conseil de l’Europe, l'aide judiciaire étant accordée dans un nombre très élevé d'affaires. Le montant alloué par affaire est également relativement élevé.
Par ailleurs, le ratio de femmes magistrates et présidentes de juridiction a largement augmenté depuis 2012. Seul le ratio de femmes procureures a légèrement diminué en 2020.
En revanche, le rapport met en avant l’important arriéré judiciaire, constaté dans toutes les matières. En effet, devant la Cour de cassation, le délai de traitement des affaires civiles et commerciales est de 504 jours, soit 2 fois supérieur à la médiane du Conseil de l’Europe. En matière administrative, le constat est le même : un délai de traitement d’environ 415 jours par affaire devant le Conseil d’Etat.
Ce rapport fait l’objet d’un article de Jean-Joris Schmidt publié dans cette même Tribune.
- Responsabilité du fait des produits défectueux - Proposition de révision de la directive sur les produits défectueux – 28 septembre 2022
Le 28 septembre 2022, la Commission a publié une proposition de révision de la directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux.
Pour rappel, la directive n° 85/374/CEE relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux met à la charge des fabricants un mécanisme de responsabilité objectif en cas d’atteinte aux personnes ou aux biens résultant d’un défaut de sécurité du produit en cause.
La nouvelle proposition vise ainsi à actualiser ce régime objectif de responsabilité eu égard aux développements des marchés du numérique et de l’économie circulaire.
La proposition étend en effet le champ d’application de l’ancienne directive à de nouveaux produits tels que les mises à jour de logiciels, les outils exploitant des systèmes d’intelligence artificielle ou les applications et services numériques défectueux, mais également les produits issus de l’économie circulaire ayant subi des changements substantiels (après reconditionnement ou remise à niveau par exemple).
Tirant les conséquences des contentieux complexes (en matière médicale notamment), la proposition de révision propose également d’aménager la charge de la preuve en faveur des victimes ainsi qu’une obligation des fabricants de divulguer des informations sur leurs produits afin de remédier l’asymétrie d’information entre fabricants et consommateurs victimes de produits défectueux.
La franchise de 500 euros originellement prévue pour la réparation des dommages matériels dans la directive serait supprimée.
En outre, la proposition prévoit d’ajouter la perte de données aux chefs de préjudices réparables au titre de la directive. En revanche, les autres types de dommages résultant notamment de violation des droits fondamentaux par un système d’intelligence artificielle (I.A.) ne seront pas couverts au titre de ce régime. Telle que conçue par la Commission, cette lacune devra être suppléée par la proposition de règlement sur l’I.A. (en cours de négociation), la proposition de directive sur la responsabilité en matière d’I.A (voir ci-dessous), et subsidiairement par les régimes nationaux de responsabilité.
Prochaine étape :
Le 3 octobre 2022, la Commission a lancé une consultation afin de recueillir l’avis des parties prenantes sur la proposition. Le délai de contribution est fixé au 11 décembre 2022.
Actions des barreaux européens :
Lors de sa réunion du 6 octobre 2022, le comité « droit privé européen » du C.C.B.E., au sein duquel Denis Philippe représente AVOCATS.BE, examine la proposition et l’opportunité de répondre à la consultation de la Commission.
V. NUMERISATION
- Intelligence artificielle – Proposition de directive sur la responsabilité en matière d’I.A. – 28 septembre 2022
Le 28 septembre 2022, la Commission a publié une nouvelle proposition de directive portant adaptation des règles de responsabilité civile extracontractuelle au domaine de l’intelligence artificielle (I.A.).
Cette proposition de directive poursuit et complète la proposition de révision de la directive relative aux produits défectueux, par un régime de responsabilité pour faute, en tenant spécifiquement compte de la nature et du fonctionnement de l’I.A.
Elle vise notamment à résoudre la problématique liée à l’opacité et la méconnaissance du fonctionnement de l’intelligence artificielle (« l’effet boîte noire ») en introduisant une présomption simple de causalité qui devrait conduire à exempter les victimes d’établir en détails le rôle causal de l’I.A. dans la réalisation de leur dommage. La proposition prévoit également un accès des victimes aux documents des entreprises recourant à l’I.A. à des fins probatoires.
L’objectif de cette proposition est ains de pallier l’insuffisance des législations nationales qui ne permettent pas toujours d’obtenir une réparation satisfaisante, le plus souvent pour des raisons probatoires.
Contrairement à la proposition de révision de la directive sur les produits défectueux, cette proposition de directive devrait s’appliquer aussi bien aux personnes physiques qu’aux entreprises, dans le cadre d’action intentées contre les fournisseurs, les développeurs ou les utilisateurs d’une I.A.
Prochaine étape :
Le 3 octobre 2022, la Commission a lancé une consultation afin de recueillir l’avis des parties prenantes sur la proposition. Le délai de contribution est fixé au 28 novembre 2022.
Action des barreaux européens :
Le 23 décembre 2021, en réponse à la consultation publique de la Commission sur l’adaptation des règles de responsabilité à l’ère numérique et à l’intelligence artificielle, le C.C.B.E. avait plaidé en faveur d’une réglementation européenne en la matière.
Le 5 juin 2020, il avait également souligné le besoin d’une règlementation propre à l’I.A. dans une réponse à la consultation publique de la Commission sur son livre blanc sur l’intelligence artificielle du 19 février 2020.
- Législation sur les services numériques – Approbation du Conseil – 4 octobre 2022
Le 4 octobre 2022, le Conseil a approuvé formellement le texte de la proposition de règlement relatif à un marché intérieur des services numériques (le D.S.A.) tel qu’il résulte de l’accord interinstitutionnel dégagé en trilogue le 23 avril 2022.
Pour rappel, ce texte est, avec la proposition de règlement relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique (le D.M.A.) issu du paquet sur les services numériques.
Le texte approuvé prévoit différentes séries d’obligations incombant aux prestataires de services numériques tels que les plateformes, les moteurs de recherches, les places de marché en ligne (« marketplaces ») et les réseaux sociaux, en fonction de leur importance. Il vise notamment à lutter contre la vente de produits illégaux ou contrefaits ; à protéger les mineurs contre la publicité ciblée et à encadrer la publication de contenus illégaux sur internet dans le respect des droits fondamentaux des utilisateurs (notamment de la liberté d’expression).
En réaction au conflit Russo-ukrainien, un mécanisme de crise a également été ajouté au texte afin de lutter contre la désinformation.
Prochaine étape :
Le texte doit à présent être publié au Journal officiel de l’Union européenne. Il entrera en application dans un délai de 15 mois après cette publication.
- Législation sur les marchés numériques – Publication du règlement – Entrée en application : 2 mai 2023
Le 12 octobre 2022, le nouveau règlement n°2022/1925 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique (législation sur les marchés numériques ou D.M.A.) a été publié.
Pour rappel, ce texte est le fruit d’un accord dégagé entre les colégislateurs le 15 septembre 2022. Il a pour principal objectif de rééquilibrer le jeu de la concurrence sur le marché du numérique en fixant des règles plus précises sur les conditions de concurrence entre les fournisseurs d’accès sur internet.
Ce règlement entrera en vigueur à compter du 1 novembre 2022 mais ne sera applicable, pour l’essentiel de ses dispositions, qu’à compter du 2 mai 2022 (article 54).
VI. RESPONSABILITE SOCIALE DES ENTREPRISES ET DEVELOPPEMENT DURABLE
- Conseil de l’Europe – Recommandation du Comité des Ministres sur le droit à un environnement propre, sain et durable – 27 septembre 2022
Pour rappel, le 11 juillet 2022, le Comité directeur pour les droits de l’Homme du Conseil de l’Europe (le C.D.D.H.) avait soumis au Conseil des Ministres un projet de recommandation pour la protection des droits humains et de l’environnement.
Le 27 septembre 2022, le Conseil des Ministres a adopté cette recommandation qui reconnait désormais un droit à un environnement propre, sain et durable, tant comme un droit autonome que comme un moyen d’assurer la jouissance et l’exercice effectifs des autres droits fondamentaux.
Le texte fait ainsi écho à la résolution 76/300 de l’Assemblée générale des Nations-Unies (l’A.G.N.U.) du 26 juillet 2022 ainsi qu’à la résolution 48/13 du Conseil des droits de l’Homme de l’O.N.U. du 8 octobre 2021 reconnaissant pour le première fois ce nouveau droit fondamental.
- Représentation des femmes dans les organes de gouvernance des sociétés – Approbation de la proposition de directive au Conseil – 17 octobre 2022
Le 17 octobre 2022, le Conseil a approuvé formellement la proposition de directive relative à un meilleur équilibre hommes-femmes parmi les administrateurs non exécutifs des sociétés cotées en bourse et à des mesures connexes, tel qu’il résultait de l’accord en trilogue le 7 juin 2022.
Pour rappel, cette proposition tend à une meilleure représentativité des femmes dans les organes de gouvernance des entreprises cotées en bourse.
Prochaine étape :
Le texte doit à présent être approuvé par le Parlement en session plénière puis publié au Journal officiel de l’U.E. A compter de cette publication, les États membres disposeront d’un délai de 2 ans pour adopter les mesures nationales de transposition idoines afin d’atteindre une représentation d’au moins 40 % de femmes dans les postes d’administrateurs non exécutifs ou d’au moins 33% de femmes dans les postes d’administrateurs tant exécutifs que non-exécutifs, d’ici 2026.
VII. COUR EUROPEENNE DES DROITS DE L’HOMME
- Nouvel outil de recherches et de partage de connaissances – 18 octobre 2022
Le 18 octobre 2022, la Cour E.D.H. a lancé sa nouvelle plateforme de partage de connaissances (C.E.D.H.-K.S.). Cette plateforme mise en place depuis 4 ans et jusque-là réservée à l’usage interne de la Cour, est désormais accessible au public sur son site internet. Pour chaque article de la Convention E.D.H., la plateforme reprend non seulement les guides sur la jurisprudence de la Cour déjà publiés auparavant, mais également un fil de jurisprudence récente et pertinente actualisée chaque semaine, ainsi qu’une sélection d’analyses jurisprudentielles plus poussées sur des thèmes clefs relatifs à un article donné et une sélection de liens utiles vers des sources internationales ou doctrinales. Le même dispositif est disponible pour des thèmes transversaux tels que l’environnement ou les droits des détenus.
Afin de faciliter la prise en main de la plateforme, la Cour a également mis à disposition des utilisateurs une vidéo de présentation de la plateforme, un tutoriel vidéo ainsi que le replay de la conférence de lancement de la C.E.D.H-K.S.
VIII. CONSEIL DES BARREAUX EUROPEENS
- Comité permanent – 7 octobre 2022
Le dernier comité permanent du C.C.B.E. a eu lieu à Andorre le 7 octobre 2022.
Une recommandation pour la remise du prix des droits humains 2022 ainsi qu’une réponse à la consultation publique sur la lutte contre les facilitateurs ont été adoptés.
La recommandation pour le prix des droits humains demeurera confidentielle jusqu’à la remise effective du prix.
Quant au projet de commentaires accompagnant le projet de réponse à la consultation sur le rôle des facilitateurs (qui était annoncé avant la réunion du comité permanent), il a finalement été incorporé dans le projet de réponse à la consultation publique.
Par ailleurs, le vote sur les projets de déclaration sur le changement climatique et de note sur la réduction de l’empreinte carbone du C.C.B.E. ainsi que le projet de mise à jour d’une publication du C.C.B.E. sur la R.S.E. et la profession d’avocat a été reporté à une date ultérieure. Ces trois documents seront préalablement renvoyés pour examen aux experts des comités compétents.
La prochaine réunion des délégations du C.C.B.E. sera la session plénière du 25 novembre 2022 qui aura lieu à Bruxelles.
- Déclaration du C.C.B.E. en soutien aux avocats arrêtés en Iran – 11 octobre 2022
Le 11 octobre 2022, le C.C.B.E. a publié une déclaration de soutien aux avocats arrêtés durant la répression en Iran.
Cette déclaration condamne tant la répression infligée aux avocats faisant l’objet de pressions, de menaces et d’interpellations dans le cadre de l’exercice de leur profession, que les atteintes graves à la liberté de manifester.
Cette déclaration a été largement relayée sur Facebook, Twitter et LinkedIn.
IX. AUTRES BARREAUX
- Espagne – C.J.U.E. - Convention d’honoraires et répression des clauses abusives dans les contrats de consommation – 22 septembre 2022
Dans un arrêt C-335/21 rendu le 22 septembre 2022, la C.J.U.E. s’est prononcée sur la compatibilité de stipulations contenues dans une convention d’honoraires avec les dispositions de la directive 93/13/CEE concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, et de la directive 2005/29/CE relative aux pratiques commerciales déloyales.
En l’espèce un avocat avait engagé contre sa cliente une procédure extrajudiciaire en paiement de ses honoraires. Il demandait notamment la mise en œuvre d’une clause de désistement en vertu de laquelle la cliente s’engageait à suivre les instructions du cabinet et à payer une indemnité dont le montant serait fixé par renvoi au barème de l’ordre des avocats de Séville « en cas de désistement avant la fin de la procédure judiciaire ou de conclusion d’un accord transactionnel à l’insu ou contre l’avis du cabinet ».
Les juridictions espagnoles ont ainsi saisi la C.J.U.E afin de préciser, d’une part, la nature de la clause litigieuse, et de déterminer, d’autre part, si le renvoi au barème de l’ordre pour la détermination du montant des indemnités était constitutif d’une pratique commerciale déloyale.
Dans son arrêt, la C.J.U.E. relève d’abord que la clause ne relève pas de l’exception prévue à l’article 4(2) de la directive selon lequel le caractère abusif de la clause ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation entre le prix ou la rémunération et la contrepartie convenue. En effet, la clause se bornant à sanctionner la violation d’une obligation contractuelle, elle ne porte donc ni sur la définition de « l’essence du rapport contractuel » ni sur la rémunération d’un service fournit. La clause est donc bien soumise au régime des clauses abusives.
La Cour retient ensuite que le renvoi au barème de l’ordre n’avait été mentionné, ni dans l’offre commerciale, ni dans le cadre de la phase d’information précontractuelle. Elle relève également que ledit barème était difficilement accessible et peu compréhensible, et qu’il était facilement susceptible d’atteindre un montant significatif, voire démesuré. La C.J.U.E. a ainsi conclu que la clause devait être qualifiée de « pratique commerciale trompeuse » dès lors qu’elle revêt un caractère déterminant du consentement du consommateur.
Enfin, la Cour renvoie au juge national le soin d’apprécier in concreto le caractère abusif et trompeur de la clause litigieuse.
Anne Jonlet
Responsable du bureau de liaison européen