I. PROFESSION D’AVOCAT, SERVICES JURIDIQUES ET ACCES A LA JUSTICE
- Coopération administrative en matière fiscale - Étendue du secret professionnel de l’avocat – Arrêt de la C.J.U.E. – Affaire « Ordre des avocats du Barreau de Luxembourg » – 26 septembre 2024
Dans la Tribune du 23 septembre 2024, je vous annonçais un arrêt dans l’affaire préjudicielle C-432/23 (Ordre des avocats du Barreau de Luxembourg) concernant le respect du secret professionnel de l’avocat en matière d’échange de renseignements sur demande en matière fiscale (sur base de la directive 2011/16/UE du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal).
Cet arrêt fait l’objet d’un commentaire de Thierry Bontinck dans la présente Tribune.
- Conseil de l’Europe - Convention sur la protection de la profession d’avocat
Alors que l'adoption de cette Convention par le comité européen de coopération juridique du Conseil de l’Europe (le C.D.C.J.) est prévue pour le mois de novembre 2024, les avocats et barreaux sont invités à lui donner le plus de visibilité possible afin d'attirer le plus grand soutien et son adoption par les États membres. Le C.C.B.E. a préparé une brochure qui peut être utilisée à cette fin.
Prochaines étapes :
Quand elle aura été adoptée par le C.D.C.J., la convention devra encore être adoptée par le Comité des Ministres, en principe, en mai 2025.
- Interdiction partielle de fournir des conseils juridiques – Tribunal de l’U.E. – 2 octobre 2024
Le 2 octobre 2024, le Tribunal de l'Union a rendu des arrêts dans trois procédures (T-797/22, T-798/22, T-828/22) concernant les recours en annulation, introduits par des barreaux et associations d’avocats belges et français, contre l'interdiction partielle de fournir des conseils juridiques dans le huitième paquet de sanctions de l'U.E.
Le règlement 2022/1904 et la décision 2022/1909 du Conseil interdisent, à quelques exceptions près, de fournir directement ou indirectement des services de conseil juridique au gouvernement russe ou à toute personne morale, entité ou organisme établi en Russie. Les requérants invoquaient notamment la violation du droit fondamental d'accès à l'assistance juridique (article 47, paragraphe 2 de la Charte des droits fondamentaux de l'U.E.), du secret professionnel de l'avocat (garanti par l'article 7 de la même Charte) ainsi que de l'indépendance de l'avocat, en soutenant le caractère disproportionné des interdictions et l’insuffisance de clarté et de prévisibilité des dispositions.
Le Tribunal a souligné l'importance fondamentale de l'accès à un avocat dans un État de droit, mais a rejeté les recours.
- Financement des litiges par des tiers – E.L.I. adopte et publie des principes de transparence et d’équité – 9 octobre 2024
L’institut de droit européen (E.L.I.) vient d’adopter des principes régissant le financement des litiges par des tiers. Une version préliminaire peut être téléchargée gratuitement ici. La version éditée et mise en page sera bientôt disponible sur le site web de l'E.L.I.
Ces principes détaillés visent à fournir des conseils essentiels aux parties au litige, aux bailleurs de fonds, aux conseillers juridiques et aux organismes de réglementation concernés par les accords de financement de litiges par des tiers. Développés en réponse à l'expansion rapide du marché mondial du financement des litiges par des tiers, les principes visent à améliorer la transparence, l'équité et l'accessibilité du financement des litiges.
E.L.I. organise deux webinaires gratuits sur ces principes :
- le 21 octobre 2024 de 18:30 à 20:00 (inscription ici)
- le 11 novembre 2024 de 18:30 à 20:00 (inscription ici)
- Journée européenne des avocats – L’importance de l’autorégulation - 25 octobre 2024
Comme chaque année, la Journée européenne des avocats sera fêtée le 25 octobre, dans le cadre de la Journée européenne de la justice. Le thème choisi par les barreaux des Etats membres pour cette édition 2024 est : « Des avocats indépendants, des démocraties plus fortes : l’importance de l’autorégulation ». Voyez à ce sujet l’article de Thierry Bontinck en édito de la présente Tribune.
- Autorisation d’inscription au barreau grec – Exercice de la profession d’avocat sous son titre d’origine – Prestations limitées au conseil sur le droit du britannique et le droit international public – Septembre 2024
Le gouvernement grec a adopté une nouvelle loi qui permet aux « solicitors », aux « barristers » et aux « advocates » britanniques d'exercer en Grèce sous leur titre d'origine.
Cette nouvelle législation permet à ces professionnels, qualifiés au Royaume-Uni et basés en Grèce, de s'inscrire à un barreau grec pour conseiller leurs clients, exclusivement toutefois sur le droit de leur Etat et sur le droit international public.
II. INTELLIGENCE ARTIFICIELLE ET PROFESSION D’AVOCAT
- A. générative - Guide pratique du C.N.B. à l’attention des avocats – Septembre 2024
Le Conseil National des Barreaux de France (C.N.B.) a publié un guide pratique sur l'utilisation des systèmes d'IA générative. Le guide commence par une explication détaillée de l'intelligence artificielle (I.A.) générative et informe les avocats sur son fonctionnement et ses capacités. Le guide fournit ensuite des exemples d'usage de l'I.A. générative et des risques associés à cette utilisation. La dernière partie du guide comprend des recommandations générales dans l’utilisation du système de requête et des recommandations spécifiques à la profession d’avocat, pour aider les avocats à utiliser les outils d'I.A. générative dans leur pratique professionnelle.
- L’I.A. en tant qu'outil professionnel – Guide de l'I.B.A.à l’attention des avocats – Septembre 2024
L’I.B.A. (International Bar Association) a publié un premier guide pratique en vue de fournir des informations sur les politiques publiques qui visent à garantir l'utilisation de l'I.A. en tant qu'outil professionnel.
Le guide se concentre sur les lignes directrices et les réglementations qui ont été adoptées dans 35 pays - dont la Belgique et 11 autres Etats membres de l'U.E. – ainsi que l'O.N.U. et l'O.C.D.E., en matière d’utilisation de l'I.A. en tant qu'outil professionnel.
- L'I.A. et la profession d’avocat – Rapport de l'I.B.A.– Septembre 2024
L’I.B.A. (International Bar Association) a publié un rapport intitulé « The future is now. Artificial intelligence and the legal profession », dans lequel il présente ses conclusions concernant l'impact de l'I.A. sur la profession d’avocat. Les principales conséquences relevées sont les suivantes :
- En ce qui concerne l'adoption de l'I.A., les grands cabinets d'avocats ont tendance à intégrer l'I.A. de manière plus sophistiquée que les petits cabinets.
- L'I.A. est couramment utilisée pour les tâches administratives, le développement commercial, le marketing et la gestion organisationnelle. Les grands cabinets utilisent également l'I.A. pour la recherche juridique, l'assemblage de documents, la rédaction de contrats et Les audits d’acquisition.
- Des questions telles que la gouvernance des données, la sécurité, la propriété intellectuelle et la protection de la vie privée constituent des défis importants, en particulier pour les petits cabinets.
- Ces derniers manquent souvent de politiques et de ressources pour gérer efficacement la gouvernance de l'I.A.
- L'I.A. devrait influencer les structures des cabinets d'avocats, les pratiques de recrutement et les modèles commerciaux, ce qui pourrait conduire à des honoraires fixes ou à valeur ajoutée et à se concentrer sur le recrutement d'avocats compétents en matière d'I.A.
- On assiste à une évolution plus large vers l'innovation et le changement au sein de la profession juridique.
- Les avocats doivent rester informés des changements technologiques et comprendre les implications de l'I.A. En outre, la formation continue des jeunes avocats est essentielle pour s'assurer qu'ils développent une expertise dans les domaines susceptibles d'être automatisés par l'I.A.
- Les avocats doivent garantir la confidentialité et le secret professionnel lorsqu'ils utilisent l'I.A. Ils sont également chargés de vérifier que les outils d'I.A. respectent les normes professionnelles.
- Les avocats doivent informer leurs clients qu’ils recourent à l'utilisation de l'I.A., ainsi que de la portée et du type d'I.A. qu’ils utilisent.
III. DROIT FONDAMENTAUX
- Rapport annuel sur l'application de la Charte des droits fondamentaux de l'U.E. – 10 octobre 2024
Depuis 2010, la Commission européenne publie un rapport annuel sur l’application de la Charte des droits fondamentaux dans l’U.E.
La Commission vient de publier l’édition 2024 de son rapport à l’attention du Parlement européen, du Conseil, du Comité économique et social européen et du Comité des régions.
Le rapport 2024 sur la Charte se concentre sur les financements de l'Union, destinés à promouvoir, protéger et faire respecter les droits fondamentaux dans l'ensemble de l'U.E.
Tout au long de son mandat 2019-2024, la Commission a en effet tenté d’orienter ses financements vers des initiatives qui renforcent les valeurs de l'U.E. et sauvegardent les droits fondamentaux, notamment en gérant le budget considérablement accru du programme « Citoyens, égalité, droits et valeurs ». La Commission a également établi une condition d'habilitation horizontale sur l'application et la mise en œuvre effectives de la Charte par les États membres afin de garantir que le financement de l'U.E. soit dépensé d'une manière conforme à la Charte.
- Journée mondiale contre la peine de mort – Déclaration conjointe d’associations de barreaux et d’avocats - 10 octobre 2024
A l'occasion de la Journée mondiale contre la peine de mort, le C.C.B.E. a publié la Déclaration conjointe appelant à l'abolition universelle de la peine de mort. Le texte de cette déclaration avait été adopté par les délégations nationales des barreaux européens lors de la session plénière du C.C.B.E. du 17 mai 2024.
IV. INSTITUTIONS DE L’UNION EUROPEENNE
- Future Commission – Portefeuille « démocratie, justice et état de droit »
L’Irlandais Michael McGrath a été choisi par la présidente de la Commission européenne pour être le nouveau commissaire chargé de la démocratie, de la justice et de l'état de droit (en ce compris la lutte contre la corruption et la protection des consommateurs). Dans sa lettre de mission, Ursula von der Leyen lui demande notamment de coordonner la lutte contre la désinformation, protéger l’indépendance des médias et des journalistes, créer une plateforme pour la société civile, ajouter une dimension marché unique dans le rapport sur l’état de droit, assurer une mise en œuvre effective de l’état de droit si nécessaire et renforcer l’application de l’article 7 du Traité sur l’U.E., développer une approche européenne de lutte contre la corruption, renforce le mandat d’arrêt européen et vérifier les domaines dans lesquels les pouvoirs du procureur européen pourraient être élargis.
Les auditions débuteront le 4 novembre 2024 et se dérouleront jusqu'au 12 novembre 2024. La Conférence des Présidents a décidé de la répartition des responsabilités entre les commissions pour les auditions de confirmation.
V. NOUVELLE LEGISLATION EUROPEENNE
- Responsabilité du fait des produits défectueux – Nouvelle directive adoptée par le Conseil – 11 octobre 2024
Le Conseil Justice et des Affaires intérieures de l'U.E. a adopté la nouvelle directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux.
Le premier texte, qui avait été proposé par la Commission européenne le 28 septembre 2022, a fait l’objet d’un accord entre les colégislateurs le 14 décembre 2023, à l’issue des négociations en trilogue. Il a ensuite été approuvé par le Parlement le 12 mars 2024.
La nouvelle directive remplacera la précédente directive[1] du 25 juillet 1985
Désormais, les produits numériques (logiciels) et les formes de distribution numériques ainsi que les modèles commerciaux de l'économie circulaire seront aussi couverts et des allégements de la preuve par présomption légale interviendront également. Les consommateurs devraient pouvoir faire plus facilement valoir leur droit à des dommages et intérêts pour des dommages causés par des produits défectueux.
- Cyberrésilience - Nouvelles exigences de sécurité pour les produits numériques – 10 octobre 2024
Le Conseil a adopté la législation sur la cyberrésilience. Le nouveau règlement[2] - dont la version initiale avait été publiée par la Commission le 15 septembre 2022 – avait fait l’objet d’un accord en trilogue qui avait été approuvé par le Parlement le 12 mars 2024.
–Il vise à garantir la cybersécurité des produits matériels et logiciels, c'est-à-dire notamment des produits en réseau, en imposant des exigences à la conception, au développement et à la fabrication de produits contenant des éléments numériques.
Prochaines étapes :
Le règlement sur la cyberrésilience devrait entrer en vigueur au second semestre 2024.
Les fabricants seront tenus de mettre des produits conformes sur le marché de l'Union pour 2027.
La Commission examinera ensuite périodiquement la législation et fera rapport sur son fonctionnement.
Anne Jonlet,
Responsable du bureau de liaison européen
[1] Directive 85/374/CEE du Conseil du 25 juillet 1985 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux.
[2] Règlement du Parlement européen et du Conseil concernant des exigences horizontales en matière de cybersécurité pour les produits comportant des éléments numériques et modifiant les règlements 168/2013/UE et 2019/1020/UE et la directive 2020/1828/UE.
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