Dans les coulisses du parlement belge - avril 2023

La réforme du Conseil d’Etat a été adoptée en commission de l’Intérieur de la Chambre. Cette réforme a été suivie de près par AVOCATS.BE.


I. Réforme du Conseil d’Etat 

a. Textes

  • Projet de loi modifiant les lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973 (DOC55 3220/001)
  • Amendements (DOC55 3320/005)
    • Voir amendements 3 à 11 déposés par Madame Matz (Les Engagés) et Monsieur De Smet (DéFi)
    • Voir amendements 12 à 19 déposé par Monsieur Boukili (PTB)
  • Avis d’AVOCATS.BE

b. Développements

Le projet de réforme du Conseil d’Etat mobilise l’attention d’AVOCATS.BE depuis de nombreux mois.

Même si, initialement, AVOCATS.BE n’avait pas été impliqué dans le processus législatif, il a réussi à « mettre le pied dans la porte » et a pu par la suite participer constructivement à divers échanges dans le cadre de la préparation de l’avant-projet de loi.

AVOCATS.BE se réjouit du fait que la réforme vise à donner des moyens supplémentaires au Conseil d’Etat, permette d’engager 14 nouveaux conseillers d’état et 32 nouveaux auditeurs, modifie la procédure et permette une meilleure infrastructure informatique pour l’institution.  

Cela étant, le projet de réforme aurait encore pu être amélioré sur certains points. 

C’est pourquoi, lorsque le texte été déposé au parlement, AVOCATS.BE a souhaité faire valoir ses observations et a été invité par la commission de l’Intérieur à rendre un avis écrit pour le 12 avril. Cet avis a été préparé par Elisabeth Kiehl, avocate au barreau de Liège-Huy et les membres de la commission de droit public. Il était accompagné d’amendements concrets, prêts à être déposés.

La revendication la plus fondamentale des avocats est sans aucun doute celle qui vise à l’abandon du mécanisme dit de « l’effet couperet », particulièrement attentatoire au droit d’accès au juge (cfr. carte blanche du 7 janvier 2023).

À plusieurs reprises, il a été demandé à la ministre de modifier les règles de procédure concernées, qui comportent de nombreuses embûches. Celles-ci rendent les recours du demandeur automatiquement irrecevables par perte d’intérêt lorsque le dépôt d’un écrit comprenant l’argumentation de ce dernier n’est pas opéré dans un délai fixé en nombre de jours. 

Pour AVOCATS.BE, la fin de l’arriéré résultant des moyens supplémentaires doit donc entrainer la fin de l’arbitraire procédural. Il ne s’agit pas du confort des avocats mais bien de faire en sorte que la réforme bénéficie au justiciable dans notre état de droit.

La résorption de l’arriéré étant attendue dans un délai de l’ordre de deux années après l’entrée en vigueur de la réforme, AVOCATS.BE a dès lors proposé que l’abandon du mécanisme de l’ « effet couperet » soit décidée dans son principe, tout en fixant son entrée en vigueur deux ans après l’adoption de la loi. Des amendements concrets ont été préparés en ce sens.

Le projet de loi était à l’ordre du jour de la commission de l’Intérieur du 12 avril 2023.

Les amendements proposés par AVOCATS.BE ont été déposés par les Engagés et DéFi. Ils ont également été déposés par le PTB.

Ils ont malheureusement été rejetés, la majorité faisant bloc derrière la ministre de l’Intérieur.

Cela étant, l’intervention d’AVOCATS.BE dans le débat a été salutaire. Certaines avancées ont pu être obtenues dans le cadre de la préparation de l’avant-projet de loi et des jalons importants ont été posés pour le futur !

 

II. Droit judiciaire et droit civil – avis d’AVOCATS.BE 

a. Textes

b. Développements

Le ministre de la Justice a sollicité l’avis d’AVOCATS.BE sur certains articles repris dans l’avant-projet de loi thématique droit judiciaire et droit civil. Pour rappel, les articles concernés par la demande d’avis portent sur l’extension de l’autorité de chose jugée (art. 23 du Code judiciaire), l’extension des chambres de règlement amiable, l’aide juridique.

Antoine Gillet, membre de la commission « droit et pratique judiciaires » a préparé l’avis sur l’extension de l’autorité de la chose jugée, dans le prolongement de l’avis précédemment rédigé au mois de septembre 2022. 

Quentin Rey, Muriel Clavie et Nathalie Garny ont préparé l’avis sur le volet aide juridique. 


III. Internement – mesure d’inaccessibilité partielle des informations relatives aux décisions judiciaires d'internement - avis d’AVOCATS.BE

a. Textes

  • Proposition de loi PS relative à l’internement modifiant le Code d’instruction criminelle et la loi du 5 mai 2014 relative à l’internement en vue d’établir une mesure d’inaccessibilité partielle des informations relatives aux décisions judiciaires d’internement (DOC55 2990
  • Avis d’AVOCATS.BE

b. Développements

La commission de la Justice de la Chambre des représentants a sollicité l’avis d’AVOCATS.BE au sujet de la proposition de loi relative à l'internement en vue d'établir une mesure d'inaccessibilité partielle des informations relatives aux décisions judiciaires d'internement.

Nathalie Colette-Basecqz, avocate au Barreau du Brabant wallon et Professeure extraordinaire à l’UNamur, a préparé l’avis en question. 

La proposition de loi, qui fait suite à un arrêt de la Cour constitutionnelle, entend mettre fin à une différence de traitement injustifiée en reconnaissant aux internés libérés définitivement le droit de solliciter l’inaccessibilité partielle des informations relatives aux décisions d’internement, ce qui est tout à fait positif. En effet, l’interné libéré définitivement aura, lui aussi, le droit à l’oubli, du moins en partie, de son passé judiciaire.

Il n’en demeure pas moins que, se calquant sur la procédure de réhabilitation, le mécanisme mis en place reste lourd et complexe alors qu’il paraîtrait plus judicieux de simplifier la procédure. 

Il aurait pu être envisagé que l’inaccessibilité partielle des informations relatives aux décisions d’internement puisse, le cas échéant, intervenir de manière automatique après la libération définitive.


IV. Administrateur d’une personne protégée – avis d’AVOCATS.BE

a. Texte

  • Avant-projet de loi relatif au statut d’administrateur d’une personne protégée
  • Avis d’AVOCATS.BE 

b. Développements

Le ministre de la Justice a sollicité l’avis d’AVOCATS.BE au sujet de l’avant-projet de loi relatif au statut d’administrateur d’une personne protégée. La commission « administrateurs provisoires » a préparé un avis très étayé sur la question.

Pour l’essentiel, les critiques d’AVOCATS.BE portent sur la procédure d’inscription au registre.

L’avant-projet de loi dispose que les candidats administrateurs doivent, au moment de la demande d’inscription, indiquer les arrondissements, voire les cantons, dans lesquels ils souhaitent pouvoir exercer leurs missions. 

AVOCATS.BE estime que les administrateurs professionnels devraient pouvoir poser leur candidature dans leur arrondissement (celui de leur cabinet principal lorsqu’il s’agit d’un avocat) et, une fois inscrits au registre, être désignés et exercer un mandat dans tous les arrondissements du Royaume, de la même manière qu’un avocat inscrit à un barreau peut plaider dans toute la Belgique.

L’avant-projet de loi prévoit par ailleurs un renouvellement annuel de l’inscription ce qui risque d’alourdir les formalités de tenue du registre. AVOCATS.BE plaide pour une inscription unique à la liste des administrateurs de biens professionnels.

L’avant-projet de loi entend enfin confier au SPF Justice la compétence de décider d’inscrire ou pas au registre les avocats candidats administrateurs de biens professionnels, ce qui, aux yeux d’AVOCATS.BE, revient à mettre en danger le principe d’indépendance de l’avocat. Si AVOCATS.BE n’est pas opposé au principe selon lequel le registre des administrateurs de biens professionnels soit tenu par le SPF, il estime qu’en ce qui concerne les avocats, la décision d’accepter ou de refuser une inscription ne peut être confiée à une autorité administrative. Dans la logique selon laquelle ce sont les juges de paix qui désignent les administrateurs de biens, AVOCATS.BE propose que la décision d’inscrire un administrateur avocat au registre national des acteurs judiciaires appartienne au président des juges de paix et de police. 

 

V. Indemnité de procédure – controverse sur l’indexation au 1er mars 2023

L'article 8 de l'arrêté royal du 26 octobre 2007 fixant le tarif des indemnités de procédure visées à l'article 1022 du Code judiciaire dispose que :  

"Les montants de base, minima et maxima sont liés à l'indice des prix à la consommation correspondant à 105,78 points (base 2004) ; toute modification en plus ou en moins de 10 points entraînera une augmentation ou une diminution de 10 p.c. des sommes visées aux articles 2 à 4 du présent arrêté".

Depuis l'entrée en vigueur de l'arrêté royal du 26 octobre 2007, l'indice des prix à la consommation a évolué à la hausse entrainant 5 indexations : le 1er mars 2011 (après le franchissement de la barre des 115,78 points en février), le 1er juin 2016 (après le franchissement de la barre des 125,78 points en mai), le 1er juin 20212 (après le franchissement de la barre des 135,78 points en mai), le 1er avril 2022 (après le franchissement de la barre des 145,78 points en mars) et le 1er novembre 2022 (après le franchissement de la barre des 155,78 points en octobre).

L'indice des prix à la consommation de février 2023 est toutefois repassé à 155,39 points, soit en dessous d'une limite qui avait été franchie en octobre 2022. 

Le cabinet du ministre de la Justice a interrogé les Ordres communautaires sur la question de l’opportunité d’indexer les indemnités de procédure à la baisse sachant que l’indice des prix à la consommation de février 2023 est tombé en-dessous de la barre de 155,78 points qui avait entrainé une indexation à la hausse en octobre 2022.
Deux interprétations étaient possibles, qui présentaient chacune des avantages et des inconvénients :

  • Soit on considère que les montants de l’indemnité de procédure doivent être réduits de 10 % étant donné que l'indice des prix à la consommation de février 2023 est passé en dessous de la barre de 155,78 points, 
  • Soit on considère qu’aucune adaptation des montants de l’indemnité de procédure ne se justifie au 1er mars 2023 dès lors que l'indice des prix à la consommation n'a pas baissé de 10 points. 

Les Ordres ont indiqué qu’ils préféraient la première interprétation. Toutefois, le cabinet semble avoir opté pour la seconde interprétation qui permet d’éviter des indexations trop fréquentes dans des périodes d’instabilité des prix. 

Le cabinet prépare une circulaire pour clarifier la situation.

Laurence Evrard, 
Responsable des actualités législatives

Crédit photo : Oakenchips, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons

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Laurence
Evrard
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