Quand la réunion tourne au vinaigre…

A chaque livraison de la Tribune, nous tenterons de vous rappeler certains principes de déontologie par des exemples pratiques.

Il ne s’agira pas de faire le tour du sujet mais de porter à votre attention un point particulier de nos règles.

Aujourd’hui, l’avocat à qui on demande de témoigner.

1. Le cas

Un avocat participe avec son client à une réunion chez un notaire en présence de la partie adverse et de son conseil.

La rencontre est houleuse, les parties étant assez remontées l’une contre l’autre.

Malgré cela, la réunion parvient à son terme grâce à l’intervention « cadrante » des professionnels du droit.

Cependant, à l’issue de celle-ci, alors que les parties sont sur le parking de l’étude, elles en viennent aux mains sous les yeux médusés de leurs avocats.

Evidemment, les parties portent plainte l’une contre l’autre et les services de police prennent contact avec les avocats pour les inviter à témoigner…

Le peuvent-ils ? 

2. Les éléments de réponse

L’on trouvera les éléments de réponse dans le code pénal et plus précisément dans un article où le terme « avocat » n’est même pas évoqué mais remplacé par une périphrase.

En effet, l’article 458 du Code pénal précise, certes dans un ordre différent, que « les personnes dépositaires par profession des secrets qu’on leur confie » et qui les auront révélés seront punis d’un emprisonnement d’un an à trois ans et d’une amende de cent euros à mille euros ou une de ces peines seulement, sauf lorsqu’elles sont appelés à rendre témoignage en justice.

Notre Code de déontologie rappelle outre en son article 1.2b que nous sommes tenus au respect du secret professionnel ainsi que de la discrétion et de la confidentialité relatives aux affaires dont nous avons la charge.

Mais qu’est-ce qu’un témoignage en justice ?

Il parait plus qu’utile de rappeler qu’il s’agit pour l’avocat de témoigner devant un juge, qu’il s’agisse d’un juge du fond ou d’un juge d’instruction et que ce n’est qu’à cette condition que l’avocat serait ainsi autorisé à révéler ses secrets.

L’exception ne s’applique donc pas lorsque l’avocat est convoqué par les policiers dans le cadre d’une enquête pénale.

Vous me direz, fort bien, mais est-ce que la rixe entre parties est bien couverte par le secret professionnel ?

Il faut répondre par l’affirmative. 

En effet, le secret professionnel s’étend à toutes les informations de la vie privée connus, appris, compris ou devinés par l’avocat dans l’exercice de sa mission.

Il est indubitable qu’au sortir de la réunion et dans le cadre d’un évènement qui concerne les deux parties et qui trouve vraisemblablement son origine dans le contentieux qui les oppose, l’on se trouve bien dans l’exercice de la mission de l’avocat.

Or, le secret professionnel de l’avocat constitue la garantie pour le client de la confiance que celui-ci place en son avocat, de sorte que le client ne puisse jamais regretter de lui avoir confié quoi que ce soit.

Il faudra donc bien se plier à la convocation des policiers mais vous devrez vous retrancher derrière le secret lorsque les questions qui vous sont posées vous exposeraient à le trahir.

Pour terminer, il est bien entendu que si vous participiez à la réunion comme curateur de faillite ou administrateur de bien, vous y êtes en qualité de mandataire de justice et non pas d’avocat.

Il vous revient en ce cas de témoigner.


Jean-Noël BASTENIERE
Avocat au barreau du Brabant Wallon
Membre de la commission déontologie

A propos de l'auteur

Jean-Noël
Bastenière
Avocat au barreau de Brabant wallon

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