Economie et justice : est-ce compatible ?

Est-il tout simplement normal que, au nom d’une nécessaire orthodoxie budgétaire, le budget de la Justice suive le sort de l’ensemble des dépenses de l’Etat ?

Ne pas donner à la Justice les moyens de fonctionner, c’est bien entendu mettre en danger la notion même d’Etat de droit. C’est aussi mettre en danger, très concrètement, l’exercice d’un droit fondamental, celui consacré par l’article 6 de la CEDH.

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ».

La Convention rappelle l’impérieuse nécessité d’un procès équitable. C’est donc un procès qui, a priori, doit permettre à chacune des parties de disposer des mêmes armes.

C’est un procès qui doit être public. On peut promouvoir l’arbitrage, la conciliation et la médiation, et nous ne manquons jamais de le faire ; le principe reste le caractère public du procès.

C’est un procès qui doit être traité dans un délai raisonnable : les délais que nous connaissons devant certaines juridictions sont inadmissibles. Ils sont constitutifs de dénis de justice.

C’est un procès mené par un tribunal impartial et indépendant. Combien de temps pourrons-nous bénéficier d’une justice impartiale et indépendante si on l’étrangle financièrement ?

C’est un procès par un tribunal établi par la loi. Telle est la règle qu’il faut rappeler. Il faut également rappeler qu’il appartient au pouvoir politique de respecter les lois qu’il a lui-même édictées.

Dans un Etat démocratique évolué, il y a, à mon sens, trois budgets que l’on ne devrait pas pouvoir réduire : la santé, l’éducation et la justice. La justice reste et doit rester un pilier fondamental d’un Etat de droit. Une justice efficiente est la garantie de l’ordre social (qui tranchera le litige qui ne peut plus venir devant le juge ?) et de l’essor économique (le monde des affaires a besoin d’une justice de qualité, rapide et efficace).

Ne pas réduire ne veut pas dire mal gérer ! Bien entendu, il faut pouvoir améliorer la gestion de tout budget de l’Etat. Les magistrats sont les premiers à demander l’autonomie de gestion. Ce n’est pas pour jeter l’argent par les fenêtres !

Nous avons la chance d’avoir encore aujourd’hui des magistrats motivés qui rendent des décisions de qualité. Cela pourra-t-il durer ? Nous devons donc poursuivre notre combat pour sauver notre justice. Nous devons nous mobiliser en cette période de négociations politiques. Car, vous l’aurez compris, sans un système judiciaire performant, les avocats ne peuvent grand-chose.

 

Votre très dévoué.

Xavier Van Gils
Président

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