Retrouvez dans cette rubrique l’expression, l’injure, le mot et la curiosité grâce auxquels vous pourrez tenter de paraître intelligent et cultivé en société !
L’expression : Envoyer un poulet
L’expression écrire, ou envoyer, un poulet signifie envoyer un billet doux.
Depuis le milieu du XVIe siècle, poulet (ou poullaict à l’époque) a d’abord eu le sens figuré de « missive » ou de « lettre » avant de se spécialiser en « billet doux ou « billet galant »
Il y a au moins deux explications pour cette dénomination bizarre.
Selon certains, ceux qui étaient chargés de remettre le billet doux au destinataire portaient des poulets sous prétexte de les vendre, mais en dissimulant le fameux billet sous l’aile de l’un d’entre eux.
Par métonymie, le billet serait devenu le poulet lui-même.
Mais pour Furetière, on a ainsi nommé ces billets parce que, en les pliant, on y faisait deux pointes qui représentaient les ailes d’un poulet.
Cette explication semble être aussi celle de Molière puisque dans L’Ecole des maris (acte II, scène II), Isabelle dit à Sganarelle :
« J’ai vu dans ce détour un jeune homme paraître,
Qui d’abord, de la part de cet impertinent,
Est venu me donner un bonjour surprenant,
Et m’a droit dans ma chambre une boîte jetée
Qui renferme une lettre en poulet cachetée ».
Si l’explication de Furetière était confirmée, la lettre en poulet sous-entendrait donc « lettre (pliée) en poulet.[1][2]
L’insulte : Lanturlu
Cette expression parisienne était une façon très vulgaire de signifier « va au diable ». Le lanturlu (ou l’enturlé) était aussi une personne extravagante et écervelée.[3][4]
Le mot : Délit, n.m.
Côté d’une pierre opposé au lit qu’elle avait dans la carrière.
La curiosité : La famille Chicane, chiche « avare », chiche !, chichi, chicot et… ricaner !
La racine onomatopéique tchicth-, qui exprime la petitesse, a donné l’adjectif chiche, « avare », daté de 1165. Chiche est présent dans l’expression (ne pas) être chiche de faire quelque chose, autrement dit « (ne pas) être avare de ses efforts pour faire quelque chose ». C’est de cette expression qu’est née l’interjection chiche !, attestée en 1866 mais probablement plus ancienne. Cela étant, la racine tchitch- a eu un autre descendant direct, le nom chicot, qui signifia d’abord « morceau de branche d’arbre », puis « dent » et « dent abîmée ». Enfin, tchitch- nous a donné chichis « manières, attesté en 1886.
[1] « Un gentleman (à Londres) demande sans inconvénient l’affiche du spectacle à une femme (…) qui se trouve sa voisine : bon moyen pour un téméraire Français de glisser un poulet en rendant l’affiche ». Stendhal, Journal, 1817 (in TLFi).
[2] Pour les « fins connaisseurs », voici une autre manière d’envoyer un poulet : https://www.youtube.com/watch?v=HFtpFrQrtus
[3] Selon le dictionnaire de l’Académie française : « Façon de parler tirée d’un refrain de chanson, et qui n’a aucun sens propre. On l’emploie pour marquer un refus accompagné de mépris, ou pour indiquer une réponse évasive. Il lui a répondu lanturlu. Il est familier ».
[4] Historiquement, de même, au pluriel, il s’agissait de vignerons du Dijonnais qui se soulevèrent contre le pouvoir royal en 1630 (et chantaient une chanson dont le refrain était lanturlu) : https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volte_du_Lanturlu