« Plus qu’un bâtiment, le palais de justice est un colosse dantesque ! Ce pilier monumental qui touche le ciel fait partie intégrante de la vie de la cité. Il est hanté de fantômes de marbre, de chair et de bronze. Tout y est démesuré : une superficie au sol de 26.000 m², 27 grandes salles, 240 salles plus petites, 1530 portes, 1513 fenêtres, 1700 radiateurs. C’est un patrimoine exceptionnel, un monument unique en son genre ».
13 pulsions, Gérard Alsteens, Serge Baeken, Pascal Bernier, Delphine Boël, Cäät, Basile Cuvelier, Laurent Dandoy, Renaud De Heyn, Johan De Moor, Max de Radiguès, Serge Dehaes, Denis Deprez, Olivier Detroz, Kim Duchateau, Aniss El Hamouri, Michel François, Vincent Glowinski, Alain Goffin, Josse Goffin, Goldrajch et Rispens, Olivier Grenson, Ben Heine, William Henne, Anne Herbauts, Herre Seele, Jannin et Dal, Léopold Joris, Pierre Kroll, Marie-Jo Lafontaine, Pierre Lallemand, Pascal Lemaitre, Marec, Pascal Matthey, Karl Meersman, Ever Meulen, Denis Meyers, Steve Michiels, Jean-Luc Moerman, José Parrondo, Frank Pe, Émilie Plateau, Marie-François Plissart, Romain Renard, François Schuiten, Joris Snaet, Elsa Stubbé, Nicola Vadot, Jean-Claude Wouters, Yslaire et Erlich.
Ils ont conjugué leur art pour nous présenter ce beau livre rassemblant cinquante images du futur possible du plus grand bâtiment civil de Belgique.
Qui s’étonnera que les échafaudages tiennent une belle place dans ce fabuleux recueil ? Depuis plus de trente ans, les façades du Palais sont dissimulées par ce tas de ferrailles qui, au fil du temps, font corps avec lui, en deviennent indissociables, rouillent à leur tour et doivent être renforcées par de nouveaux étais. Le temps de la troisième couche est proche. Et elles n’empêchent pas les plafonds de s’effondrer, l’humidité de perler, les champignons de proliférer …
Quel gâchis !
La Fondation Poelaert a pour but de sauver le palais, d’obtenir des pouvoirs publics qu’ils s’attachent à la définition d’un master plan pour l’ensemble du complexe Poelaert et de la justice en Belgique au XXIe siècle. Et qu’ils y consacrent les moyens nécessaires.
Chant désespéré ou vision d’avant-garde ? Le temps des palais de justice est-il révolu ? Les œuvres des 50 artistes invités ne permettent pas de répondre à ces questions. Il faut admettre que certaines d’entre-elles ne sont pas franchement optimistes …
« Prends garde à la bête humaine car elle est dans la main du diable. Seul de tous les primates créés par Dieu, il tue par plaisir, concupiscence ou avidité. Oui, l’homme peut tuer son frère pour posséder la terre de son frère. Ne le laisse pas croître en grand nombre et se multiplier, car il transformera en désert son pays et le tien. Chasse-le, renvoie-le dans sa tanière au fond de la jungle. En vérité, je te le dis, il est le fourrier de la mort » (29e rouleau, verset 12, de la Loi des Singes, extrait de La planète des singes, film de Franklin J. Schaffner d’après l’ouvrage éponyme de Pierre Boulle, cité par Max de Radiguès, en légende de son dessin).
L’art est fait pour troubler, disait Braque.
« Ce beau livre est aussi et d’abord un manifeste politique qui doit aider à sauver ce bâtiment hors normes et hors du temps. Pour lui redonner une fierté et le sortir enfin de son sarcophage d’échafaudages qui l’asphyxie. Nous voulons offrir de vraies ambitions à la ville et la région ».
Demain, Le palais de Justice, par Jean-Pierre Buyle et Dirk Van Gerven (dir.), Fondation Poelaert, Les Impressions nouvelles, 2018, 112 p., 29€.