L’immunité de plaidoirie se justifie par la nature des fonctions de l’avocat et les qualités notamment d’indépendance attendues de lui.
Ce principe est consacré à la fois par le Code judiciaire et par le Code pénal :
« Les avocats exercent librement leur ministère pour la défense de la justice et de la vérité. Ils doivent s’abstenir d’avancer aucun fait grave contre l’honneur et la réputation des personnes à moins que la nécessité de la cause ne l’exige et sous la réserve des poursuites disciplinaires et de l’application de l’article 445, s’il y a lieu » (article 444 du Code judiciaire).
« Si un avocat, dans ses plaidoiries ou dans ses écrits, attaquait méchamment la Monarchie, la Constitution, les lois du peuple belge ou les autorités établies, le tribunal ou la cour qui connaît de l’affaire pourrait faire dresser procès‑verbal par le greffier et saisir de l’incident le conseil de l’Ordre dont relève l’intéressé » (article 445 du Code judiciaire).
« Ne donneront lieu à aucune poursuite répressive les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux, lorsque ces discours ou ces écrits sont relatifs à la cause ou aux parties.
Les imputations calomnieuses, injurieuses ou diffamatoires étrangères à la cause ou aux parties pourront donner lieu soit à l’action publique, soit à l’action civile des parties ou des tiers » (article 452 du Code pénal).
Cependant, l’immunité de plaidoirie n’existe que dans l’intérêt du client, non pas dans celui de l’avocat.
L‘immunité disparaît en dehors de l’audience : « Lorsqu’il s’exprime dans les médias, qu’ils soient écrits, radiophoniques, télévisuels ou autres, l’avocat peut faire mention de sa qualité d’avocat, sachant qu’il n’est pas, en cette circonstance, couvert par l’immunité de la plaidoirie.» (article 7.4. du Code).
En effet, soumis au droit commun, l’avocat se doit, en dehors du prétoire d’avoir plus que les autres une certaine réserve à l’égard de l’institution judiciaire et prendre garde à maîtriser ses « passions » notamment lorsque la couverture médiatique lui est offerte.
De plus, l’immunité couvre les seuls écrits et les paroles en rapport avec l’affaire dont le tribunal a à connaître.
Enfin, l’immunité ne débouche pas sur l’irresponsabilité de l’avocat : sa responsabilité peut être engagée s’il porte atteinte à la réputation d’un tiers.
De la même manière des poursuites disciplinaires peuvent également être initiées à son encontre.
À ce propos, je ne résiste pas au plaisir de reproduire une tirade qui a conduit à la reconnaissance d’une faute disciplinaire dans le chef d’un avocat qui avait interpellé un magistrat de cette manière :
« Je ne vous supporte plus. J’en ai assez de vous voir. Vous me gonflez avec votre sourire en coin. Vous serez responsable de ce gâchis. Ce que vous avez fait est dégueulasse. Je regrette de ne pas avoir, lorsque vous étiez à Lille, déposé plainte contre vous »[1].
Vous l’aurez constaté, il s’agit d’une décision disciplinaire française. On n’est jamais assez prudent !
Jean-Noël BASTENIERE
Administrateur
[1] Cité par Benjamin Victor Labyod in « Etendue de la liberté de l’avocat », www.village-justice.com, 10/04/2013.