La grande misère de la justice

Ce 4 septembre 2024 la Cour d’assises du Hainaut a jugé irrecevables les poursuites à charge d’un accusé qui avait fait partie des most wanted belges pendant pas moins de 17 ans, au motif qu’il n’était plus possible de lui garantir un procès équitable dès lors que les expertises et les pièces à conviction qui devaient pouvoir être examinées dans le cadre d’un débat contradictoire, n’avaient pas été conservées de manière appropriée, et que le dossier répressif était incomplet et inutilisable, en raison de l’humidité des locaux où il avait été conservé.

Voici donc des victimes laissées à l’abandon et un accusé qui est certes libre mais qui, peut-être, entendait être lavé de tout ou partie des préventions mises à sa charge et qui n’aura jamais l’occasion de faire valoir ses arguments. Comme l’a souligné la Cour dans son arrêt, une telle situation est indigne d’un état de droit.

Pauvre justice !

Pauvre, notre justice l’est, et au sens premier du terme. On ne compte plus les « Palais » de justice qui tombent littéralement en ruine. Ce 6 septembre 2024, la présidente du tribunal de 1ère instance du Brabant Wallon a publié un communiqué de presse pour alerter sur la situation de cette juridiction, en soulignant que le conseiller en prévention a conclu son récent rapport en ces termes : « La situation est désastreuse. Je conseille de fermer ce bâtiment à la sécurité et à la salubrité plus que douteuses ».

Et quand un nouveau Palais est construit, comme à Namur, il est inauguré en mars 2024 … mais ne sera utilisable qu’en fin 2025 car les marchés publics pour l’acquisition et le montage du mobilier et le câblage informatique n’ont pas été lancés en temps opportun.

Et pendant ce temps, un loyer important est payé, on croit rêver, ou plutôt cauchemarder.

Et que dire de l’état des prisons qui sont, pour la grande majorité d’entre elles, dans un état de délabrement tel qu’il n’est pas exagéré de dire que les détenus font l’objet de traitements inhumains et dégradants, sans même parler de leur surpopulation pour laquelle pas grand-chose n’est fait malgré nos victoires judiciaires ?

Faut-il aussi rappeler le manque criant de magistrats et de personnel de greffe ou de parquet dans certaines juridictions et les retards dans l’informatisation qui ont pour effet qu’à certains égards le travail se fait encore dans les conditions du 20ème siècle ?

Dans ces conditions, j’en appelle aux négociatrices et négociateurs du futur gouvernement fédéral : la Justice n’est pas un secteur dans lequel des économies budgétaires sont possibles. Au contraire, il faut investir sans quoi notre pays ne sera bientôt plus un état de droit !

Stéphane Gothot,
Président

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Stéphane
Gothot
Vice-président

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