La délicate question de la régionalisation de la justice

L’accord du gouvernement prévoit la mise en place d’un « large débat démocratique » en vue de préparer la prochaine réforme de l’Etat dès 2024. Alors qu’une commission parlementaire tente de procéder à l’évaluation des six premières réformes, très prochainement les citoyens seront consultés, en ligne, pour donner leur avis sur cette septième réforme.
 
L’expérience est nouvelle et séduisante. Sans entrer dans un système de démocratie directe, le pouvoir politique prend le risque d’une forme de consultation populaire qui n’aura cependant que la force d’une enquête, non scientifique, permettant l’expression de chacun. L’exercice est intéressant mais périlleux, tant la problématique de la réforme de l’Etat est complexe et parfois clivante.
 
Depuis une année, AVOCATS.BE rencontre les responsables des partis francophones du pays. Nous les avons tous rencontrés pour évoquer la régionalisation de la justice. L’origine de cette démarche était la mise en place d’une agence flamande de la justice avec l’engagement d’un millier d’agents et ce, selon la ministre de la justice de la région flamande, Madame Demir, pour préparer la Flandre à gérer plus de compétences à partir de 2024. Depuis le 1er janvier de cette année, cette agence est devenue une réalité.
 
Bien entendu, AVOCATS.BE peut difficilement prendre attitude en faveur ou non d’une régionalisation de la justice. Il paraît difficile pour notre institution de prendre une position qui pourrait être défendue au nom des 8.200 avocats de notre Ordre communautaire sur ce point. Certains souhaitent le maintien d’une justice au niveau fédéral tandis que d’autres sont de chauds partisans d’une régionalisation.
 
Notre souhait était d’attirer l’attention des partis francophones sur cet enjeu, de leur rappeler que toute réforme doit s’envisager dans l’intérêt du citoyen et de leur dire que nous sommes partants pour participer à une réflexion sur le sujet, le but étant de faire entendre la voix des avocats et des justiciables. Il nous semble essentiel d’être présents dans ce débat avec la volonté d’analyser, de manière la plus exhaustive possible, l’ensemble des problèmes qu’une telle réforme pourrait engendrer.
 
C’est de manière unanime que les partis francophones nous ont indiqué que ce sujet n’était pas à l’ordre du jour de leurs préoccupations et qu’ils n’étaient pas demandeurs d’une telle régionalisation. Avec des nuances, bien entendu, allant d’une opposition farouche à un intérêt intellectuel…
 
Dans la précédente Tribune, j’évoquais la réforme envisagée du Conseil d’Etat et ses incontestables enjeux régionaux. Certes, cela relève de la ministre de l’Intérieur et non du ministre de la Justice, mais le Conseil d’Etat est bien une juridiction qui pourrait connaître une forme de régionalisation.
 
Si au nord du pays, le sujet de la régionalisation de la justice ne fait pas l’unanimité, il n’est cependant pas tabou. Selon le président de l’O.V.B., Peter Callens, une défédéralisation intégrale de la Justice est possible. Au sud du pays, on semble nettement plus frileux !
 
Mais, même si nous ne sommes nullement demandeurs d’une telle réforme, il n’est pas inutile d’y penser et de, d’ores et déjà, préparer nos arguments. Ne soyons pas attentistes. Osons au moins y réfléchir. Nous renouvelons donc notre offre pour mener avec le monde politique une réflexion sur le sujet.
 
« Gouverner, c’est prévoir. Ne rien prévoir, ce n’est pas gouverner, c’est courir à sa perte » écrivait Emile de Girardin. Rien n’est pire que la politique de l’autruche !

A propos de l'auteur

Xavier
Van Gils
Ancien Président

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