Compte-rendu de la rentrée du barreau de Bruxelles

Rivé devant son écran à l’heure dite, violent orage dans le ciel de Bruxelles en fond sonore, l’auditeur distancié de la séance de rentrée solennelle de la Conférence du jeune barreau de Bruxelles aura bien fait d’attendre que la retransmission vidéo puisse débuter.

Dans le même ordre d’apparition que jadis, aux roulements du tonnerre et au battement de la pluie, Me Pierre-Yves Thoumsin fera succéder la description des vibratos et feedbacks maîtrisés de Jimi Hendrix le matin du 18 août 1969, lorsqu’il offrit aux festivaliers de Woodstock une interprétation militante et improvisée de l’hymne national américain.

Manifestement passionné, l’orateur contera, avec la précision et le souci du détail qu’on lui connaît, la grande aventure du rock and roll, de Bill Haley à U2, en passant par Bob Dylan et Led Zeppelin. Et de le définir : le rock serait une musique authentique, anticonformiste et qui opère un magnétisme sur son auditeur. Le rock nous rappelle, dira Me Thoumsin, que rien ne nous oblige à accepter les vies prévécues qui nous sont proposées.

Le rock n’est pas mort, mais prenons garde, nous dira Me Thoumsin : l’emprise du numérique se resserre sur notre quotidien. Comment ne pas l’entendre lorsqu’on assiste à cette atypique rentrée solennelle par le truchement d’un écran d’ordinateur ?

Dans un monde d’intelligence artificielle, le plaidoyer de Me Thoumsin sera de nous inviter à ne pas oublier l’humain, dont la singularité, l’inventivité, la capacité d’expression, ne peut être remplacée par la machine qui doit rester un adjuvant.

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C’est avec beaucoup de complicité que la présidente du jeune barreau, Me Panagiota Baloji, répondra à l’orateur qu’il a probablement oublié de parler de l’électro-pop, de la soul, du disco, de l’électro-dance, du rap, du hip-hop.  Si elle reconnaîtra sans difficulté que le rock était inventif et subversif lorsqu’il était porté par une jeunesse du même acabit, elle le rangera au rang des souvenirs de musée, estimant que les jeunes expriment désormais leur rébellion par le rap et le hip-hop.

Dans un propos plus rassembleur, Me Baloji dira à ses auditeurs que toute forme d’art est en réalité porteuse de liberté, d’indépendance, de singularité, ou même de révolte. Cet art, qu’à bien comprendre la présidente, nous pourrions plus librement exercer si nous nous reposions plus amplement sur les machines pour remplacer les tâches de notre quotidien.

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En forme de conclusion, le bâtonnier de l’Ordre Maurice Krings, prendra à bras le corps la problématique de l’intelligence artificielle et dira à son auditoire toute la préoccupation que cela doit susciter chez un juriste.

Partant d’exemples concrets et interpellants venus des Etats-Unis, mettant en cause l’utilisation de logiciels d’analyse du risque de prévenus (avec biais liés à l’origine), le bâtonnier rappellera très justement à quel point la machine peut-être un outil dangereux. De l’oxymore « intelligence artificielle », le bâtonnier entend en réalité retenir le mot « artificielle » là où beaucoup s’extasient devant le mot « intelligence ».

Si la machine est une aide, son usage doit être strictement réglementé :

  • parce que la machine est une création humaine influencée par son créateur, l’époque, le milieu et les stéréotypes de son auteur ;
  • parce qu’il faut être attentif aux éventuels opérateurs, financement et contrôles de processus ;
  • parce que la pensée juridique est en constante évolution, tandis que la machine est dépassée sitôt élaborée.

Pour conclure ce bel après-midi de rentrée, le bâtonnier de l’Ordre dira à son auditoire combien il est en conséquence préférable d’être acteurs de ce changement, puisqu’il est inévitable.

 

Guillaume Sneessens,
Avocat au barreau de Bruxelles

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