A l’orée de cette année nouvelle, retrouvez dans cette rubrique l’expression, l’injure, le mot et la curiosité grâce auxquels vous pourrez tenter de paraître intelligent et cultivé en société !
L’expression : Annus horribilis
1992, sale année pour la reine d’Angleterre… Nos lecteurs « pipole » se souviendront avec émoi de la séparation du prince Andrew d’York, fils cadet de la reine, de son épouse Sarah Ferguson après la publication de photos de cette dernière embrassant un autre homme. Un mois plus tard, la princesse Anne divorce de son premier mari Mark Phillips. Elle se remariera en Ecosse, selon le rite presbytérien écossais, avec Timothy Laurence. Sans oublier la mésentente entre le prince Charles et Lady Diana, qui connaîtra son apothéose au mois de décembre avec la séparation, après le discours de Guildhall. Pour « couronner » le tout, quatre jours avant le fameux discours de la reine, le château de Windsor fut la proie d’un grave incendie, réduisant en fumée de nombreuses œuvres d’art et engendrant une crise liée au financement de la reconstruction du château.
« 1992 is not a year on which I shall look back with undiluted pleasure. In the words of one of my more sympathetic correspondents, it has turned out to be an 'Annus Horribilis'. I suspect that I am not alone in thinking it so. ».
C’est donc le 24 novembre 1992 qu’Elizabeth II parlera de l’année écoulée comme d’une « Annus horibilis » (année horrible en latin). Cette locution nominale est reprise régulièrement par la presse économique, politique ou même littéraire, en diverses occasions n'ayant aucun rapport avec 1992. Je ne sais si pour vous cette année 2023 fut « horribilis ».
Certains drames qui l’ont rythmée ne m’empêcheront néanmoins pas de vous souhaiter une « Annus (2024) Mirabilis », comme John Dryden titrait un poème écrit en 1667 et considérant 1665-1666 comme « année miraculeuse » à Londres. En vérité, l’année fut dramatique. Dryden écrivit ce poème depuis Charlton dans le Wiltshire, loin de l’épidémie de peste et du grand incendie de la capitale, que ce poème a le mérite de décrire de façon « flamboyante ». Selon Dryden, la ville avait vaincu ces deux fléaux, ce qui était miraculeux. Dieu avait sauvé l’Angleterre ! Et c’est certainement ce poème qui a inspiré le jeu de mots humoristique de la Reine Mère.
Meilleurs vœux à tous et que cette année 2024 soit Mirabilis, Miraculis et non Horribilis !
L’injure : Faquin
Selon certains dictionnaires, l’origine de ce mot nous vient de l’italien « facchino » signifiant « porte faix » (homme de basse condition chargé de porter les fardeaux). Selon d’autres, il nous viendrait de l’arabe « fakiran », qui désignait les gueux, les mendiants.
Le terme était utilisé pour parler d’un personnage méprisable et sans honneur, inspirant la méfiance. Milieu du XXe siècle, on l’emploie pour désigner un « mannequin d’osier, de paille ou de bois avec lequel on s’exerce à la lance ». Début du XXe siècle, ce mot désignait un homme hautain et arrogant, vaniteux et sot. Une faquinerie était une sottise, une fanfaronnade
Le mot : dioptre
Ce mot est particulier à plusieurs égards : il s’agit d’un nom sans rime, rare, masculin ou féminin.
Au masculin, il signifiait « dilatateur, speculum ». Ce sens a disparu et selon le TLFi (Trésor de la Langue Française informatisé), il désigne aujourd’hui la surface séparant deux milieux transparents, homogènes et de réfringence différente… Au féminin, il s’agit d’un instrument employé en astronomie et en géométrie pour observer des objets éloignés !
La curiosité : Les mots sans rime
Je vous le disais, dioptre n’a pas de rime. Les mots suivants non plus : abrupt, belge, bulbe, chanvre, cuistre, drachme, fichtre, fourche, girofle, huître, humble, hydne (sorte de champignon à chapeau hérissé), incurve, jungle, larve, ménechme (sosie), meurtre, monstre, muscle, pampre (rameau de vigne qui porte feuilles et fruits), pauvre, perdre, poivre, pourpre, puisque, quatorze, quinze, sceptre, sépulcre, siècle, simple, stagner, stupre, sylve, tertre, vaincre, zancle (poisson osseux et brillant, assez rare, comme son nom).
Jean-Joris Schmidt,
Administrateur
