La Cour de cassation au secours des avocats ou son interprétation salvatrice de l’article 747 du Code judiciaire

Le 18 novembre 2021, notre Cour de cassation a rendu un arrêt important, d’une part bien entendu car il précise l’interprétation qui doit être donnée à l’application de l’article 747, mais aussi, à un niveau plus « politique », car elle rappelle une logique évidente de bonne administration de la justice en rendant aux avocats des attributions essentielles face au risque d’une dérive de « gouvernement de juges » interprétant de façon stricte et sans sens pratique un article pourtant destiné à offrir une certain souplesse aux plaideurs.

Cet arrêt, publié sur Strada, fut rendu sur pourvoi dirigé contre un jugement rendu en dernier ressort par le juge de paix du 4ème canton de Bruxelles du 3 juin 2020, pourtant date anniversaire de votre serviteur. 

En effet, par ordonnance du 9 octobre 2019, le juge a fixé le calendrier de la procédure, conformément à l’article 747 du Code judiciaire.
Suite à cette ordonnance, les parties devaient déposer leurs conclusions respectivement les 2 décembre 2019, 3 janvier 2020 et 20 janvier 2020.

Elles ont déposé leurs conclusions au greffe respectivement les 10 décembre 2019, 13 janvier 2020 et 3 février 2020, chaque fois en renvoyant expressément à un accord entre elles afin de déroger aux délais pour conclure fixés par le juge.

Or, à la plus grande surprise des avocats, le juge a écarté des débats les conclusions versées hors délai prévu par le calendrier, mais pourtant bien déposées dans le délai amiable fixé entre avocats. 

La Cour de cassation rappelle les règles applicables et notamment le fait que les parties peuvent, de commun accord et en concertation avec le juge, fixer un agenda contenant les délais pour conclure ainsi que la date de l’audience (art. 747, § 1er du Code judiciaire).
À défaut d'un agenda convenu à l'amiable, le juge fixe lui-même le calendrier de la procédure judiciaire, en tenant compte des observations éventuelles des parties (art. 747, § 2).

Certes, la Cour rappelle que sans préjudice de l'application des exceptions prévues à l'article 748, §§ 1er et 2, ou de la possibilité pour les parties de modifier de commun accord les délais pour conclure convenus entre eux ou le calendrier de procédure arrêté par le juge, les conclusions qui sont remises au greffe ou envoyées à la partie adverse après l'expiration des délais sont d'office écartées des débats (art. 747, § 4).

Mais surtout, elle précise qu’il ressort de ces dispositions que, lorsque le juge fixe le calendrier de la procédure et que les parties s’en écartent d’un commun accord, le juge, qui a connaissance de cet accord, ne peut écarter aucune conclusion des débats sans prendre cet accord en considération.

En l’espèce, le juge qui a écarté les conclusions déposées notamment le 13 janvier 2020, n’a pas pris en considération l’accord des parties de déroger aux délais pour conclure qu’il avait fixé. Il ne justifie pas légalement sa décision. La Cour annule à l’unanimité à le jugement attaqué et renvoie la cause au juge de paix du 1er canton de Louvain.

On ne peut que saluer cette jurisprudence de bon sens, qui rend aux avocats, et à leurs clients, le contrôle de leur procès et favorise les accords de procédure, qui sont aussi un élément essentiel d’une bonne justice et d’une bonne confraternité.
Une décision qu’on ne manquera pas de garder dans sa mallette pour parer à toute discussion en audience.

La partie du texte de cet arrêt relative à l’article 747 du Code judiciaire peut être consultée, en néerlandais, ici.

Jean-Joris Schmidt, 
Administrateur

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