Nombreux sont les cas dans lesquels un assureur protection juridique, un syndicat, un employeur, un parent proche contribuent à financer la procédure à laquelle est partie leur assuré, leur affilié, leur préposé ou le membre de leur famille. Comment se comporter en ces occasions ?
Outre les hypothèses relevées ci-avant, vous aurez entendu parler des nombreuses procédures qui opposent une PME wallonne à un géant de l’internet.
À l’occasion de l’une d’entre elles, ce dernier avait demandé en justice que la première soit condamnée à dire si elle bénéficie, pour ce litige, d’un financement tiers et, en ce cas, d’identifier son ou ses financeur(s).
La Cour d’appel de Bruxelles n’a pas retenu cet argument.
Mais la question qui se pose à cette occasion est de savoir si déontologiquement une obligation de révélation pèse sur l’avocat qui intervient dans une procédure pour un client mais dont les honoraires sont payés par un tiers.
Hasard du calendrier, la dernière livraison de l’Observateur de Bruxelles (2025/1, n°139, p.3 à 5) comportait un éditorial intitulé « Les enjeux financiers du financement de contentieux par les tiers » rédigé par le bâtonnier élu du Barreau de Paris, Me Louis Degos.
Celui-ci y précise qu’en particulier, « le système du tiers financeur interroge sur l’identité du véritable dominus litis et de fait sur l’indépendance de l’avocat, celui-ci étant susceptible d’être soumis à des pressions pour se conformer à certaines instructions du financeur. »
Il est évident que cette pression n’a pas lieu d’être et, en ce qui nous concerne, l’article 7.20 du Code de déontologie contient déjà les réponses à nombre des risques identifiés par ailleurs dans cet article par le bâtonnier élu de Paris : confusion entre les intérêts propres du tiers financeur et ceux du client, primauté des instructions du tiers financeur, secret professionnel à l’égard de celui-ci, etc.
En effet, notre texte est rédigé comme suit (je souligne) :
« L’avocat dont l’intervention aux côtés de son client peut être ou est financée par une tierce personne, s’assure de la liberté exercée par ce client dans le choix de son avocat.
Il veille à l’exercice de la maîtrise du litige par ce client, auprès duquel il prend ses instructions.
Il ne divulgue au tiers financeur, aucun élément qui serait couvert par le secret professionnel ou la confidence de son client.
Sans préjudice de l’alinéa 1er, l’avocat peut, avec l’accord du client et dans l’intérêt de celui-ci, tenir le tiers financeur ou son intermédiaire informé de l’évolution du litige et des démarches qu’il estime devoir entreprendre. Il peut notamment lui transmettre les avis et actes de procédure. »
Ce texte préserve donc adéquatement l’indépendance de l’avocat par rapport au tiers financeur. Et c’est particulièrement sur ce point que l’avocat devra rester attentif tout au long de son intervention.
Enfin, l’avocat n’a pas à révéler qui finance le litige, cette question étant couverte par le secret professionnel.
Jean-Noël BASTENIERE