"Un an dans la forêt" et "S’en aller", par François Sureau

Quand tu aimes, il faut partir.

Auditeur au Conseil d’État, avocat, écrivain, premier rédacteur des statuts du parti En marche, fondé par Emmanuel Macron, académicien, … François Sureau a aussi été légionnaire.

Comme Blaise Cendrars, auquel il consacre ce court récit, Un an dans la forêt.

En 1938, alors âgé de 51 ans, Cendrars s’amourache d’Élisabeth Prévost, de 24 ans sa cadette, une belle et riche aventurière (elle a déjà traversé l’Afrique plusieurs fois et vient - semble-t-il, car quelle est la part de la légende ? - de s’occuper de l’importation en Espagne d’une race de lapins français, le Fauve de Bourgogne).

Il la rejoint dans ses Ardennes natales, aux confins de la Belgique. Il y passera un an, avant de la quitter pour s’engager lorsque la seconde (allons, soyons optimistes, je n’écris pas deuxième…) guerre mondiale éclatera.

J’imagine cette maison en lisière de forêt, les rêves qu’un enfant peut y faire. La nôtre, que j’ai perdue voici trente ans, n’était pas différente. Les royaumes de l’enfance se ressemblent tous. Lorsqu’on les vend, on dirait que c’est la maison qui disperse ses habitants et non l’inverse. Ayant perdu la mienne, j’ai décidé d’écrire, pour abolir le temps. C’était aussi se faire, comme dit Cendrars, « un nom nouveau ».

Le départ est donc un thème omniprésent, l’appel du large, la fraternité que crée l’épreuve. Le départ, c’est aussi l’aspiration de François Sureau qui, également originaire des Ardennes, entremêle ses souvenirs avec son récit. C’est qu’il a quelques points communs avec Cendrars, même si leurs destinées n’ont rien de semblable.

S’il est une vraie division entre les hommes, elle passe plus à mes yeux par cette forme particulière de foi où un élan mystérieux prend presque toute la place que par les opinions politiques ou religieuses. Je reste proche de ceux qui y croient, fussions-nous à jamais séparés par ces convictions que l’on tient, à tort me semble-t-il, pour essentielles, et séparés de ceux qui n’y croient pas, communierions-nous aux mêmes idées.

S’en aller est un peu de la même veine, à cela près que, cette fois, François Sureau convoque non pas un écrivain mais une série de voyageurs : Nabokov, Andric, Leblanc, Boileau et Narcejac, Lindon, Beaupré, Loti, Leys, Hugo, Éluard, Hergé, les Philby père et fils, Greene, Nizan, Kessel, Buffon, Maugham, Mérimée, Stendhal, Breton, Huysmans, Fermor, Stevenson et, même, Mandrin, sont ainsi, parmi d’autres, invoqués pour dialoguer avec l’auteur sur la soif de partir.

En lisant ce livre, j’ai beaucoup pensé à mon père, qui s’en serait délecté. L’élégance de l’écriture se met au service d’une prodigieuse connaissance de la littérature. Je dois avouer que, pour moi, la lecture est plus difficile car ma connaissance de ces auteurs est trop fragmentaire.

Le François Sureau de Le chemin des morts ou de Pour la liberté m’était plus accessible. Mais il réapparaît parfois au hasard de ces pérégrinations littéraires.

La liberté est une étrange chose. Elle disparaît lorsqu’on veut en parler. On en parle jamais aussi bien que lorsqu’elle a disparu. Vouloir la dire, c’est vouloir retenir l’eau entre les doigts d’une main ouverte.

Fermons donc les doigts, mais pas les yeux, ni notre bouche.

Patrick Henry
Ancien président

A propos de l'auteur

Henry
Patrick
Ancien Président d'AVOCATS.BE

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