Au cours de ces derniers mois, notre couverture d’assurance responsabilité professionnelle a suscité de vives d’inquiétudes.
Les avocats francophones et germanophones sont actuellement assurés auprès de la SA ETHIAS au travers de polices d’assurance collectives souscrites à leur bénéfice par l’Ordre auquel ils sont inscrits. Nombre d’entre eux ont également conclu, cette fois à titre individuel ou au travers de leur structure d’exercice, des polices complémentaires afin d’être couverts au-delà du plafond de 2.500.000 € de la police collective. De son côté, AVOCATS.BE a, voici plusieurs années, négocié avec la SA ETHIAS un contrat cadre couvrant la responsabilité professionnelle des mandataires de justice et liquidateurs amiables, à laquelle les avocats concernés sont libres de souscrire ou non, à titre individuel.
En juin dernier, l’assureur a fait savoir que notre sinistralité était mauvaise, la charge de la police (c’est-à-dire l’ensemble des décaissements exposés par la compagnie ainsi que les montants mis en réserve dans les dossiers de sinistres en cours) excédant le montant total des primes encaissées.
La SA ETHIAS a ainsi fait part de sa volonté de :
- majorer la prime d’assurance RC professionnelle de 1er rang, qui passerait de 550 € à 1.500 € par avocat inscrit au tableau ou à la liste E et de 275 € à 750 € par avocat stagiaire,
- résilier et renégocier tant la police cadre RC mandataires de justice et liquidateurs amiables, que les contrats individuels de 2e rang souscrits par les avocats.
Ces majorations n’étant pas acceptables, les bâtonniers les ont contestées.
Des contacts ont alors été pris avec d’autres assureurs et des négociations ont été entreprises avec ETHIAS. Des offres fermes ont finalement été émises par trois assureurs, dont les bâtonniers ont débattu à plusieurs reprises, éclairés par les avis de la commission des assurances d’AVOCATS.BE. Ils ont notamment eu égard aux primes proposées ainsi qu’à l’étendue et aux détails des couvertures d’assurance offertes.
A l’occasion de leur assemblée générale de ce 29 novembre, ils ont pris la décision d’accepter une nouvelle offre de la SA ETHIAS, dont les termes peuvent être résumés comme ceci :
- à compter du 1er janvier 2022, la prime d’assurance annuelle en RC professionnelle de 1er rang sera de 760 € pour les avocats inscrits au tableau ou à la liste E et de 380 € pour les avocats stagiaires, les conditions d’assurance demeurant inchangées sous réserve de la franchise qui passera de 2.500 € à 5.000 €,
- une nouvelle police cadre RC mandataire de justice et liquidateur amiable, aux conditions identiques à la précédente, prendra cours le 1er janvier 2022 également,
- la compagnie proposera aux avocats ayant souscrit auprès d’elle des assurances de 2e rang, de reconduire leur contrat aux mêmes conditions, tout en se réservant d’en renégocier la prime lorsque le contrat actuellement en vigueur était déficitaire,
- l’assureur s’engage à maintenir les contrats en vigueur pour les deux années à venir, soit en 2022 et 2023.
Concrètement les avocats n’ont, en ce qui concerne leur assurance RC professionnelle de 1er rang, aucune démarche à entreprendre. Ils sont et demeureront couverts au travers du contrat souscrit par les différents barreaux. Ceux-ci choisiront, chacun pour ce qui le concerne, la manière dont l’augmentation de la prime sera répercutée.
Une police cadre RC mandataire de justice et liquidateur amiable reste accessible aux avocats qui souhaitent y recourir, aux mêmes conditions que l’actuelle.
Quant aux assurances complémentaires de 2e rang, tant en RC professionnelle qu’en RC mandataire de justice et liquidateur amiable, la compagnie ETHIAS maintient son offre contractuelle, chaque avocat étant libre d’y souscrire ou non, éclairé par l’avis de son courtier.
La majoration de la prime en RC professionnelle est substantielle – un peu plus de 38 % – mais le chemin parcouru depuis l’annonce initiale de la compagnie ETHIAS, qui impliquait un triplement de la prime, doit être apprécié à sa juste valeur.
Il n’en reste pas moins qu’une assurance collective souscrite par les barreaux reste avantageuse : la répartition du risque sur un grand nombre d’assurés permet d’obtenir une prime moins élevée qu’en cas d’assurance individuelle. Elle est également une garantie pour les clients, en ce qu’elle leur donne la certitude que la responsabilité de leur avocat est assurée, en 1er rang, jusqu’à 2.500.000 €. Elle est enfin une manifestation de la solidarité entre les avocats, la prime étant payée par les barreaux et répercutée au travers de la cotisation à l’Ordre.
Quant à l’augmentation de la franchise, une majorité s’est dégagée au sein de l’assemblée générale pour estimer qu’elle était préférable afin de limiter la majoration de la prime. Il faut rappeler que lorsque la responsabilité de l’avocat est engagée, l’assureur indemnise la partie lésée sans en déduire la franchise, dont elle poursuit ensuite le remboursement à charge de l’assuré. L’intention des barreaux est de réfléchir au développement de mécanismes de solidarité permettant de venir en aide aux avocats qui, en raison de difficultés financières, ne seraient pas en mesure de s’acquitter, en tout ou en partie, de la franchise à la suite d’un sinistre dans lequel leur responsabilité serait engagée.
La période de grandes turbulences que nous venons de traverser, doit nous conduire à la réflexion et à l’action. D’année en année, bien trop de sinistres mettant en cause la responsabilité professionnelle d’avocats, doivent être déclarés. Ils sont, dans leur grande majorité, consécutifs au non-respect de délais. Si la solidarité entre les avocats plaide en faveur du maintien d’une assurance collective, elle commande également que, tous et chacun, nous réfléchissions à notre manière de travailler et maintenions nos connaissances à jour.
C’est de cette manière que nous réduirons les cas dans lesquels notre responsabilité professionnelle pourrait être recherchée. Dans deux ans, un nouveau contrat pourra alors être négocié à des conditions que nous espérons plus favorables.
Stéphane Boonen,
Administrateur en charge des assurances
Geoffroy Cruysmans,
Directeur du département assurances