AVOCATS.BE soutient la journée de l’avocat en danger et lance un appel à manifester ce 24 janvier 2019 à 13h devant le consulat de Turquie (rue Montoyer n° 4 à 1000 Bruxelles) pour la défense de la défense.
Cette Journée a vu le jour en 2010, à l’initiative de l’AED (EDL : European Democratic Lawyers). Le SAD (Syndicat des Avocats de la Démocratie), membre de ce réseau européen, soutient l’initiative.
Chaque année, un pays est sélectionné et un rapport est publié sur la situation de confrères qui sont menacés, recherchés, persécutés, mis sous pression, réduits au silence et emprisonnés. Pour l’édition 2019, le piteux spectacle offert par la Turquie du président Recep Ayyip Erdogan est sous le feu des projecteurs.
Le problème est loin d’être neuf. Depuis les années 90, la situation n’est pas sûre pour les avocats des droits humains dans ce pays. A partir de 2011, les avocats turcs font l’objet d’innombrables poursuites et arrestations. Nombre d’entre eux séjournent de longs mois dans les prisons turques et leur procès est actuellement toujours pendant. En 2013, une opération de police est menée à l’encontre des avocats membres du CHD (Progressive Lawyers Association). A cette occasion, 22 avocats sont prévenus et 9 d’entre eux sont emprisonnés.
La dernière opération de grande envergure a lieu suite à la tentative de coup d’Etat en juillet 2016. Le président Erdogan réagit alors en restreignant encore davantage les droits et libertés des avocats, des juges, des journalistes, etc. A cet effet, une liste est publiée, contenant les noms de centaines de personnes recherchées. Les préventions à leur charge sont aussi diverses qu’improbables, visant entre autres leur appartenance à des réseaux terroristes ou illégaux, des insultes au régime en place et à son président ou des détournements de fonds. En réalité, toutes les raisons sont bonnes pour noircir l’image de ces avocats qui ne font finalement qu’exercer leur métier, et ce afin d’empêcher tout mouvement de solidarité à leur égard.
Selon le dernier rapport du bureau du Haut-commissaire pour les Droits Humains au sein de l’ONU[1], on dénombrait environ 570 arrestations d’avocats à la fin de l’année 2017 ; 1.480 poursuites judiciaires à l’encontre d’avocats ; 79 longues peines d’emprisonnement. Dans la plupart des cas, les avocats sont accusés d’avoir eu des rapports avec des réseaux gülenistes. Au moins 14 présidents d’associations d’avocats ont été arrêtés ou détenus.
Le risque n’est pas seulement l’emprisonnement. Des centaines d’avocats qui ne sont pas arrêtés mais poursuivis se voient interdits de représenter leurs clients dans des affaires spécifiques, particulièrement politiques. Quant à des associations d’avocats telles que le CHD ou l’OHD et le MHD (Mesopotamian Lawyers Association), elles sont tout simplement fermées.
Or, notre métier consiste à représenter nos clients, à faire valoir leurs intérêts devant les juridictions nationales et internationales. Nous ne pouvons tolérer les attaques personnelles portées à nos confrères dans l’exercice de leur profession. L’avocat doit exercer de manière libre et indépendante. Si les voix de nos confrères se retrouvent muselées, c’est l’arbitraire du pouvoir qui gagne davantage de terrain dans sa course à l’extinction des valeurs démocratiques. Se taire, c’est laisser gagner la peur et l’intimidation.
Ce 24 janvier, les avocats sont attendus devant le consulat de Turquie afin de manifester leur mécontentement et leur désapprobation face aux atteintes graves et toujours plus nombreuses aux droits et libertés de leurs confrères turcs.
Rendez-vous en toge le 24 janvier 2019 à 13h devant le consulat de Turquie, rue Montoyer n° 4 à 1000 Bruxelles.
[1] (http://www.ohchr.org/Documents/Countries/TR/2018-03-19_Second_OHCHR_Turkey_report.pdf)