Interview des présidents des jeunes barreaux et des délégués des stagiaires concernant la lutte contre le harcèlement

Le harcèlement est l’affaire de tous.

En février 2022, la cellule d'avocats contre le harcèlement (CACH) s'est réunie dans la salle du Conseil de l'Ordre de Bruxelles.

La CACH avait invité l'ensemble des présidents des jeunes barreaux et des représentants des stagiaires des barreaux francophones et germanophone.

Les débats furent animés.

Plusieurs interrogations et questionnements ont été débattus. La CACH a interrogé ces représentants des jeunes avocats.

Voilà leurs réponses :


Savez-vous si les stagiaires sont informés lors de leurs cours CAPA de l'existence de la cellule d'avocats contre le harcèlement ? La question du harcèlement est-elle abordée lors d'un des cours CAPA et dans les syllabus remis aux stagiaires ?

Selon le Carrefour des Stagiaires du Barreau de Bruxelles, « cette problématique a fait l’objet d’une communication écrite à l’attention de tous les stagiaires de 1ère année avec pour mission d’informer ces derniers sur l’existence de ce Carrefour et de la CACH. Il a alors été demandé, dans le cadre des cours CAPA, aux professeurs de déontologie de faire une lecture complète de ce courrier ».

Selon la Présidente du Jeune Barreau du Brabant wallon, Célia DIERICK, « après avoir interrogé les stagiaires des différentes années, il semble que seules les troisièmes années aient reçu une brève information à ce propos ».

Selon François DEGUEL, délégué des stagiaires du Barreau de Liège-Huy-Verviers-Eupen, « les représentants de la commission CACH du Barreau de Liège-Huy font une intervention afin de présenter la commission et les différentes possibilités qui s’offrent à eux en cas de situation problématique ».

Les délégués du Barreau de Namur, rajoutent également que « dans le cadre des cours CAPA, les représentants de la cellule locale namuroise se présentent en début d’année et informent les stagiaires nouvellement arrivés au Barreau de l’existence et des missions de la CACH.

Des informations sont également diffusées par voie électronique et sur les médias sociaux via des groupes privés qui rassemblent les stagiaires et les avocats régulièrement inscrits au Tableau.

Ce faisant, la question du harcèlement dans sa conception large est abordée et discutée, le cas échéant, en donnant lieu à un débat interactif gravitant autour de la question de savoir ce qui constitue une forme de harcèlement au travail et surtout comment réagir lorsqu’on l’on est témoin ou victime de ce type de comportement ».


Avez-vous connaissance de cas de harcèlement de jeunes avocats dans votre barreau ? Quelle a été votre réaction ? Les bâtonniers informés ont-ils pris une initiative : accueil ? écoute ? réinsertion? suivi disciplinaire? ...

Le Carrefour des stagiaires du Bruxelles connait des cas de harcèlement, mais peu. En effet, il est clair que ces chiffres ne reflètent pas la réalité et que ce nombre limité de cas est lié à la crainte d’être placé dans le feu des projecteurs.

D’après la Présidente du Jeune Barreau du Brabant wallon, Célia DIERICK, elle a déjà été contactée par quelques stagiaires qui éprouvaient des difficultés dans le cadre de leur stage. Bien que la plupart se sont avérées des incompatibilités de caractère ou organisationnelles, quelques cas peuvent effectivement être qualifiés d’ « harcèlement ». Des suites disciplinaires sont en cours concernant ces quelques dossiers.

Néanmoins, le Barreau de Bruxelles dispose également d’une cellule « bien-être et prévention », qui constitue également une cellule d’écoute en toute confidentialité et permet aux membres de cette commission de désigner un avocat-accompagnant afin que cet avocat en difficulté puisse se faire assister, ou encore obtenir un forfait pour des heures de thérapie et/ou de coaching. Ainsi, depuis septembre 2021, il y a déjà eu 9 prises de contact avec cette cellule.

À nouveau, le délégué des stagiaires du Barreau de Liège-Huy-Verviers-Eupen nous indique qu’ « il arrive que des stagiaires se confient aux membres du Jeune Barreau. Il faut alors essentiellement écouter et guider le stagiaire en fonction de ce qu’il/elle souhaite.

Parfois, le stagiaire ne souhaite pas que ce sujet soit ébruité. Nous respectons alors son choix mais restons au autant que possible à sa disposition.

Dans d’autres situations, le stagiaire nous demande quelles sont ses options, comment les mettre en œuvre, qui sont les personnes ressources. Nous essayons alors de l’orienter au mieux. Nous ne prévenons pas nécessairement le Bâtonnier, mais nous tournons vers la commission du stage. Le Bâtonnier agit ensuite, et la réaction dépend des cas (courrier, convocation, …) ».

D’autre part, les délégués du Barreau de NAMUR et membres de la cellule namuroise indiquent également que « bien que la règle d’or que nous observons scrupuleusement – en qualité de membres de la cellule locale namuroise mais aussi de représentants au sein de la CACH au niveau de l’OBFG – soit l’absolue discrétion, nous avons déjà eu connaissance de cas de harcèlement de jeunes avocats et/ou collaborateurs et associés au sein du Barreau de Namur.
 
Cela étant, les jeunes stagiaires constituent ipso facto un public d’autant plus vulnérable du fait de leur âge mais aussi de leur dépendance économique vis-à-vis de leur patron de stage.

Typiquement lorsqu’un cas est signalé, un ou des membres de la cellule locale se mettront directement en contact avec la personne qui a été témoin ou victime de harcèlement, en toute discrétion et avec délicatesse.

Les membres de la cellule accompagneront la personne en question dans ses démarches, en particulier, si elle souhaite porter plainte ou mobiliser les autorités ordinales.

En cas de comportements problématiques répétés et signalés ou encore lorsque l’on constate un « turnover » particulièrement important d’un cabinet qui engage régulièrement des stagiaires, rapport en sera fait auprès du bâtonnier.

Le cas échéant, les membres de la cellule accompagneront et conseilleront la personne ayant subi le comportement harcelant pour mettre fin à son contrat de stage dans les meilleures conditions possibles et éventuellement en mettant en place une réinsertion dans un autre cabinet.

Si la victime souhaite effectivement porter plainte ou mobiliser les autorités ordinales dans le cadre d’un suivi disciplinaire, à nouveau, les membres de la cellule locale mettront un point d’honneur à soutenir et à conseiller la personne ayant subi le harcèlement dans ses démarches ».

Êtes-vous demandeur qu'une disposition spécifique consacrée à la sensibilisation de la lutte contre le harcèlement soit insérée dans les contrats de stage ?

Selon le Carrefour des stagiaires de Bruxelles, une telle disposition permettrait de conscientiser et de sensibiliser les stagiaires à cette problématique, qui est encore trop peu visible actuellement.

Selon la Présidente du Jeune Barreau du Brabant wallon, Célia DIERICK, une telle disposition serait intéressante, dans la mesure où elle serait suivie d’effets pratiques, et non qu’elle ait simplement le mérite d’exister.

À cet effet, le délégué des stagiaires du Barreau de Liège-Huy-Verviers-Eupen considère que « l’attention des stagiaires doit être attirée dès le départ sur les mécanismes qui sont mis à disposition lorsqu’ils sont confrontés à une telle problématique. Une mention dans le contrat de stage est par conséquent nécessaire, puisqu’il s’agit du document sur lequel chaque stagiaire peut s’appuyer en cas de problème ».

L’avis est rejoint par les délégués du Barreau de NAMUR, qui considère également que « très certainement, bien que les Chartes sur lesquelles notre Commission a pu travailler ces derniers mois pourraient utilement être annexées au contrat de sage, il est nécessaire et indispensable qu’une clause soit explicitement reprise dans le contrat de stage de chaque stagiaire à ce propos ».

Avez-vous connaissance de l'existence dans votre barreau d'avocats accompagnants spécialement formés à l'écoute et à la réinsertion, prêts à aider les avocats victimes de harcèlement ?

Au sein du Barreau de Bruxelles, il existe donc une cellule « bien-être et prévention », qui dispose d’avocats ayant des connaissances spécifiques en la matière.

Au sein du Barreau du Brabant wallon, Célia DIERICK, Me Nathalie COPPENS est en charge de la CACH.

Le Barreau de Liège-Huy, quant à lui, souhaite organiser une formation à cette fin. Une équipe de différents avocats, multidisciplinaires et d’âges différents, vient d’être constituée. Une formation spéciale a été organisée le 23 avril à cet effet.

Au sein du Barreau de NAMUR, des avocats accompagnants spécialement formés à l’écoute et à l’insertion font partis de la cellule harcèlement namuroise.

La formation de ces avocats dispensée à ces avocats leur ont permis d’être sensibilisés à ces questions et leur ont fournis les bons outils afin de soutenir les avocats ayant subi des actes harcelants, notamment en les accompagnants dans leurs démarches, ou encore en leur prêtant une oreille attentive.

***

Avocat(e)s, vous êtes victime ou témoin de harcèlement, violence ou discrimination au sein du barreau ? 

Contactez en toute confidentialité la Cellule d’Avocats Contre le Harcèlement (CACH) : 


Jean-Pierre Buyle,
Président de la CACH

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