Des solidarités de fait entre les avocats francophones d'Europe

Mes chers Confrères,
 
 
Après Paris, Luxembourg, Genval, Neufchâtel, Lille, Liège, Bremmen, Strasbourg, c’était au tour de Mons de recevoir la vingtaine de représentants des barreaux de France, de Suisse, de Luxembourg et de Belgique. Le bâtonnier Jean-Emmanuel Barthélemy a accueilli très chaleureusement les 11èmes rencontres annuelles des barreaux francophones d’Europe dans la salle de son conseil de l’Ordre.
 
La francophonie est importante. Il y a environ 280 millions de locuteurs dans le monde. Le français est la 5ème langue la plus parlée. Deux pays francophones siègent au G7. 85 % des francophones sont situés en Afrique. Le développement important de la population de ce continent devrait nous porter à 700 millions de francophones en 2050. Les impacts sur l’identité, la culture et les systèmes juridiques applicables sont évidents.
 
Nombreux sont les sujets qui nous ont rassemblés pour créer ensemble des solidarités de fait.
 
La codification d’abord.
 
Il n’y a pas que la Belgique qui repense ses codes. L’Europe aussi s’y met. Après le Code civil européen et le Code européen des contrats en devenir, c’est l’idée d’un Code européen des affaires qui est à l’ordre du jour, à l’initiative de la France et de l’Allemagne et de la société civile (association Henri Capitant, universités, Think Thank, …). L’idée est de créer un espace économique unifié et d’incarner le projet européen dans un objet concret (social, fiscal, commerce électronique, sociétés, exécutions, banques, assurances, marchés financiers, …).
 
Le barreau souhaite être associé à cette réflexion. Nous avons décidé de prendre des initiatives pour 2018 et 2019.
 
Nous avons aussi parlé de la volonté manifestée par plusieurs Etats de créer un tribunal spécialisé de haut niveau, apte à trancher des litiges commerciaux transfrontaliers en recourant à la langue anglaise : les Chambres commerciales internationales entre entreprises à Paris, la Brussels International Business Court à Bruxelles. Ceci répond à une des attentes exprimées par AVOCATS.BE dans les memorandums publiés à l’occasion des élections fédérales. C’est un facteur d’harmonisation de droit. C’est aussi une manière de se positionner dans l’après Brexit, même si ces projets ne mettent pas en avant la défense de la langue française.

Le « Paquet services » nous a donné l’occasion de réfléchir à la manière d’anticiper l’application du test de proportionnalité à nos règles de déontologie. Nous avons demandé au C.C.B.E. d’élaborer une boite à outils pour appréhender les règles déontologiques au-delà de la liberté d’établissement dans nos Ordres.
 
Nous avons aussi décidé de travailler ensemble à l’élaboration d’un memorandum commun en vue des élections européennes de mai 2019. Maître Eric Balate a proposé un premier texte pour une politique de reconnaissance des droits du citoyen dans les litiges individuels et collectifs.

Le C.N.B. a aussi attiré notre attention sur un rapport de la Cour des Comptes remettant en question l’utilisation du français au sein des juridictions européennes pour des motifs d’économie. Ceci reviendrait à ne plus traduire en français les décisions judiciaires prononcées.
 
Ne faut-il pas défendre le recours à la langue française, d’autant que :

     - avec le Brexit, le nombre d’affaires introduites en langue anglaise devrait nécessairement diminuer ;
     - avec l’intégration du tribunal de la fonction publique par le tribunal de l’Union, le nombre d’affaires en français devrait augmenter ;
     - l’architecture de la Cour de Justice est conçue pour fonctionner en français. Les délibérés se font en effet en français.

 
Nous nous sommes aussi inquiétés des projets de directives européennes qui pourraient porter atteinte au secret professionnel de l’avocat (blanchiment, Pana, …). Nous avons adopté à l’unanimité une motion.

Nous avons également rappelé que le secret professionnel est un des piliers essentiels de tout Etat de droit. Nous avons invité le C.C.B.E. et tous les autres barreaux européens à insister sur l’importance des valeurs de la profession d’AVOCATS.BE. Nous avons prié instamment les autorités de respecter les droits fondamentaux des citoyens.

 

Votre dévoué,

 
Jean-Pierre Buyle, Président d'AVOCATS.BE

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