Rock’n’roll justice par Fabrice Epstein

Comme la justice, le rock raconte des histoires, permet de mieux comprendre l’être humain, d’approfondir ses comportements. Les rockeurs sont des narrateurs. Littérature chantée, poésie parfois, ou borborygmes inanimés pour les plus réactionnaires, le rock met en scène, conte, contredit, évoque des faits, des situations qui provoquent la loi. N’a-t-on pas parlé dans les années soixante-dix d’outlaw rock ? Ce n’est pas pour autant que les rockers qui défient la loi sont les mieux armés pour embrasser la vie des accusés qui attendent le verdict, des condamnés à vivre… dans les prisons. Là-bas, la paillasse est dure, inexorablement.

Fabrice Epstein est avocat au barreau de Paris, spécialisé dans le droit des sociétés. Fusions et acquisitions, capital investissement, n’ont pas de secret pour lui. Mais il est aussi grand amateur de rock et chroniqueur pour le magazine Rock&Folk.

Le projet de cet ouvrage, qui est une compilation ordonnée de ses chroniques (de nombreuses sont parues dans Rock&Folk, mais la majorité sont inédites), est donc de nous livrer une histoire judiciaire du rock : petites affaires et grands scandales, plagiats, outrages aux mœurs, séparations, escroqueries, exploitations, contrats léonins, engagements militants, faits divers scandaleux, meurtres… Le rock est un miroir grossissant.

J’ai eu un peu de mal à entrer dans le projet. Certaines chroniques m’ont paru imprécises, parfois approximatives, écrites dans un style qui se veut moderne et direct mais se révèle parfois compliqué, voire ampoulé. Un ouvrage, abondamment illustré, qui intéressera donc plus les amateurs de rock culture, à la recherche d’histoires étranges et de détails croustillants, que ceux qui préfèrent la littérature.

Compilation ordonnée, disais-je. Les articles sont classés par thèmes. Un peu comme dans un ouvrage juridique, donc. Cela facilitera les recherches.

Vous saviez sans doute que Bob Dylan avait pris la tête d’une mobilisation pour obtenir la révision du procès du boxeur noir Ruben « Hurricane » Carter, condamné - peut-être à tort - pour meurtre. Saviez-vous qu’une de ses phrases est régulièrement utilisée par les juridictions californiennes : « you don’t need a weatherman to know which way the wind blows », pour signifier qu’un fait est tellement évident qu’il n’a pas à être démontré ? Ou qu’il avait eu à soutenir un procès contre le Conseil représentatif des institutions et de la communauté croate de France ? Il lui était reproché d’avoir, à l’occasion d’une interview sur l’esclavagisme et le racisme aux États-Unis, déclaré : « Si vous avez du Ku Klux Klan dans le sang, les Noirs peuvent le sentir, même encore aujourd’hui. Tout comme les Juifs peuvent sentir le sang nazi et les Serbes le sang croate… ». Ce qui me fait penser que demain, sans doute, les Ukrainiens…

Une section a attiré plus particulièrement mon attention. Elle est consacrée à des procès imaginaires. Jean de Breteuil a-t-il tué Jim Morrison en lui fourguant l’héroïne qui l’a emporté ? Ray Davies, le leader des Kinks a-t-il outragé les Beatles en chroniquant pour le magazine Disc and music Echo, l’album Revolver ? Le père de Marvin Gaye était-il maître de ses actes quand il a tué son fils ? Sid Vicious est-il coupable du meurtre de son amie Nancy Spungen, dans des circonstances qui nous font furieusement penser à l’affaire Westphal ?

Celle que je préfère est sans doute sa plaidoirie pour le claviériste des Sparks, Ron Mael. À la manière d’un conférencier Berryer, Fabrice Epstein plaide que le port de sa moustache, à la Hitler, ne peut être considérée comme une incitation à la haine raciale.

Mesdames et Messieurs, nous les entendons hurler de loin : mais enfin cette moustache, n’y avait-il pas de signes plus distinctifs pour un chanteur en mal de reconnaissance ?

Ce sont les sirènes de la morale et de la bien-pensance.

Oui, nous les entendons distinctement, avec leurs gros sabots et leurs bris de verre. Une moustache à la Hitler, mais c’est inconcevable, presque pire qu’une croix gammée ou la reproduction miniature d’un stuka. Et se cacher derrière le fait qu’avant Hitler, il y eut Chaplin, et avant Chaplin d’autres, Clémenceau peut-être, pour faire valoir une moustache brosse, le frein à morve, car c’est comme cela qu’on l’appelle…

Patrick Henry, 
Ancien Président

 

A propos de l'auteur

Henry
Patrick
Ancien Président d'AVOCATS.BE

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