A chaque livraison de la Tribune, nous tenterons de vous rappeler certains principes de déontologie par des exemples pratiques.
Il ne s’agira pas de faire le tour du sujet mais de porter à votre attention un point particulier de nos règles.
Aujourd’hui, l’avocat et les contacts avec les médias.
Non, le contact entre les avocats et les médias n’est pas limité à ceux qui d’entre nous pratiquent certaines matières.
Nous pouvons tous, à un moment donné, être confrontés à une communication avec la presse, quelle qu’elle soit.
Dans ce cas, comment réagir ?
Dans sa grande sagesse, le Code de déontologie prévoit les différentes hypothèses en ses articles 7.4 et suivants.
Ainsi, lorsqu’il s’exprime dans les médias, qu'ils soient écrits, radiophoniques, télévisuels ou autres, l’avocat peut faire mention de sa qualité d’avocat, sachant qu’il n’est pas, en cette circonstance, couvert par l’immunité de la plaidoirie. Il respecte en toutes circonstances le secret professionnel et la confidentialité des échanges entre avocats.
S’agissant d’une affaire dont il est chargé, l’avocat s’abstient de déplacer le débat hors de l’enceinte judiciaire et limite ses communications et commentaires à ce qui est justifié par les nécessités de la défense des droits de son client. Il peut réagir aux éléments portés à la connaissance du public et exposer l’opinion de son client.
En règle, l’avocat qui, à propos d’une affaire dont il est ou a été chargé, prévoit une intervention dans les médias, est invité à participer à une émission diffusée par ceux-ci ou à répondre à une interview journalistique, ou qui peut raisonnablement s’attendre à l’être, en informe aussitôt son bâtonnier qui lui fait les recommandations et injonctions qu’il juge utiles ou nécessaires.
Dans la mesure du possible, il s'assure préalablement auprès du journaliste des conditions relatives à son intervention ainsi qu'à la diffusion ou à la reproduction de ses propos. Il s’informe de l’identité ou de la qualité des autres intervenants et personnes dont les propos seront diffusés ou reproduits avec les siens.
L'avocat ne s’exprime dans les médias à propos d'une affaire dont il est chargé, qu’avec l'accord de son client et dans l’intérêt de celui-ci. Le bâtonnier de son Ordre ou, en cas d’incident survenant à l’occasion d’une audience, du barreau de la juridiction saisie de l’affaire, peut lui demander de justifier de cet accord.
Lors de chacune de ses interventions, l'avocat respecte les principes qui font la base de sa profession. Il fait notamment preuve de :
- 1° dignité : en ayant conscience des obligations particulières que lui impose sa qualité d'avocat et en veillant à la modération de ses propos et commentaires ;
- 2° délicatesse : en s'abstenant notamment de s’exprimer au nom de tiers par lesquels il n'est pas mandaté, de formuler des attaques contre quiconque, de tenir des propos offensants, de porter atteinte à la présomption d'innocence et à la vie privée, de méconnaître le respect dû par lui aux cours et tribunaux ;
- 3° loyauté : en ne fournissant que des informations dont il a raisonnablement pu se convaincre de l’exactitude ;
- 4° confraternité : en s’abstenant de toute mise en cause des conseils d’autres parties ainsi que de tout commentaire à propos de l’intervention de ses prédécesseurs et successeurs.
Dans la mesure où la défense des droits du client le justifie, avec l’accord exprès de ce dernier et pour autant que la loi ne s’y oppose pas, l’avocat est autorisé à remettre aux médias des notes ou argumentaires rédigés à leur intention, conformes aux principes rappelés à l’article 7.7. Il en informe sans délai les conseils des autres parties ainsi que, s’il y a lieu, le ministère public et leur en transmet une copie.
Il peut, sous les mêmes réserves, communiquer aux médias une copie de ses écrits et actes de procédure préalablement déposés ainsi que des décisions judiciaires, pour autant que :
- 1° les débats soient publics ;
- 2° les conseils des autres parties et, s’il y a lieu, le ministère public soient prévenus de cette communication, au plus tard au moment où elle a lieu.
L'avocat s'abstient de tout commentaire entre la mise en délibéré et le prononcé de la décision judiciaire. Il ne commente publiquement celle-ci qu'avec modération, dans le respect qu'il s'est engagé sous serment à manifester à l'égard des cours et tribunaux, spécialement lorsque des recours restent ouverts.
L'avocat qui estime, dans une situation particulière, en raison notamment de la détention de son client ou du comportement de tiers, que l'application des dispositions du code est susceptible de préjudicier aux droits de la défense de son client ou à l'égalité des armes dont celui-ci doit bénéficier, s'en ouvre à son bâtonnier qui décide alors des éventuelles dérogations à lui accorder en fonction des circonstances.
L'avocat qui se décharge de la défense des intérêts de son client ou qui en est déchargé par celui-ci, s'abstient de tout commentaire dans les médias.
L'avocat qui souhaite s'exprimer publiquement, verbalement ou par écrit, à propos d'une affaire clôturée qu'il a traitée, se conforme aux principes rappelés à l’article 7.7.
En outre :
- il en informe préalablement son bâtonnier qui lui fait les recommandations et injonctions qu'il juge utiles ;
- il obtient l'autorisation écrite de son ancien client ou de ses ayants droit.
L'avocat qui intervient dans les médias pour fournir des renseignements de portée générale ou de nature juridique et scientifique, ou qui est invité à s’exprimer à propos d’une affaire en cours dans laquelle il n’est pas et n’a pas été consulté, respecte les principes qui régissent la profession et ce, que cette intervention se fasse ou non en qualité d’avocat.
Dès lors, outre ce que le Code prévoit, laissez-moi vous donner quelques conseils non exhaustifs avant de s’adresser aux médias :
Un passage à l’antenne étant par principe fugace, il est souvent recommandé à l’intervenant de s’exprimer de manière simple et concise.
Ceci ne correspond pas toujours aux nuances que nous devons apporter à nos propos. Veillez à déterminer à l’avance quel sera le contenu de votre intervention, le cas échéant, validé par votre bâtonnier.
Il sera utile de rappeler le principe de la présomption d’innocence pour éviter au client d’être jugé avant même que les juges aient eu l’occasion de lire le dossier.
Si tel est le cas potentiellement et afin de respecter le principe de l’égalité des armes, il sera utile de s’en référer à votre bâtonnier pour qu’il vous rappelle les contours de votre intervention.
Jean-Noël BASTENIERE
Avocat au barreau du Brabant Wallon
Membre de la commission déontologie