« All we ask is trust All we got is us Loyalty, loyalty, loyalty »

« All we ask is trust
All we got is us
Loyalty, loyalty, loyalty »

Kendrick Lamar

A chaque livraison de la Tribune, nous tenterons de vous rappeler certains principes de déontologie par des exemples pratiques. Il ne s’agira pas de faire le tour du sujet mais de porter à votre attention un point particulier de nos règles.

Aujourd’hui, le devoir de loyauté.


Notre code de déontologie précise en son article 1.2 que « l’avocat est tenu des devoirs suivants : (…) (e) la loyauté tant à l’égard du client qu’à l’égard de l’adversaire, des tribunaux et des tiers » 

« Comme l’expose Pierre Lambert, la mission de l’avocat ne peut se concevoir sans une parfaite loyauté de la part de celui qui en exerce la profession, à peine de fausser complètement le rôle social qui est le sien »1.
 
Sur ce thème, je ne peux mieux faire que reprendre la recommandation du 22 juin 2004 du conseil de l’Ordre de Bruxelles qui rappelle que la loyauté constitue avec l’indépendance et avec le respect du secret professionnel son devoir le plus impérieux. 

Elle doit inspirer l’ensemble des comportements de l’avocat, elle confère à son intervention un fondement moral et les manquements à cette vertu essentielle peuvent conduire l’avocat non seulement à devoir se déporter mais également à être sanctionné disciplinairement2.

Cette recommandation énonce quelques cas d’application particuliers : 

« L’avocat se gardera ainsi, notamment :

  • De conclure ou de plaider contre les éléments de fait dont il a connaissance ; 
  • De faire au bâtonnier, ou à son délégué, une quelconque déclaration mensongère ; 
  • De prendre un engagement envers le bâtonnier, et de ne pas l’informer ensuite des circonstances nouvelles qui l’empêcheraient de l’honorer ; 
  • De conseiller à son client un quelconque comportement illicite ; 
  • D’organiser une réunion à son cabinet avec la partie adverse afin d’en tirer un avantage, tel que profiter de cette réunion pour faire signifier à cet adversaire une citation à personne à comparaître en référé ; 
  • De faire signer un document dans son cabinet par une partie adverse non assistée d’un conseil, sauf circonstances particulières ;
  • D’assister à une réunion en présence de son client et de la partie adverse, sans avoir averti préalablement l’organisateur de celle-ci et le conseil de la partie adverse ;
  • De soutenir une thèse antinomique par rapport au contenu d’une pièce confidentielle ;
  • De faire état d’un document qui lui serait parvenu illicitement ou par erreur ; 
  • D’enregistrer une conversation téléphonique ou un entretien à l’insu de son interlocuteur, quel qu’il soit ; 
  • D’accepter de défendre un dossier sachant qu’il ne réunit pas les compétences objectives pour le faire, ou qu’il ne dispose pas du temps nécessaire pour exécuter sa mission dans un délai raisonnable ; 
  • De plaider le dossier en dehors du prétoire et, en toute hypothèse, de participer à des débats médiatisés concernant des affaires en cours dans lesquelles il intervient comme conseil ;
  • De tromper les autorités ou les tiers en se présentant à eux comme étant le conseil d’une personne, lorsqu’il n’est pas ou plus consulté par celle-ci.

En revanche, l’avocat n’a aucune obligation, au nom de la loyauté, d’attirer l’attention de son adversaire sur ses oublis éventuels ». 

Si l’avocat n’est pas le conseil de son adversaire, il ne peut cependant le tromper, a fortiori si celui-ci se défend seul, sans avocat.

La cour d’appel de Mons a ainsi jugé : 

« (…) Déjà antérieurement, les tribunaux avaient rappelé que l’avocat avait un devoir de loyauté à l’égard des tiers, spécialement à l’égard d’une partie adverse non assistée d’un conseil. L’obligation de probité qui trouve son fondement à l’article 456 du Code judiciaire, consiste à observer rigoureusement les devoirs de la justice et de la morale. 

La loyauté implique que l’avocat donne des informations exactes et complètes à son adversaire, à l’avocat de son adversaire et aux magistrats.

Ce devoir est fondé sur une exigence de bonne foi et de fair-play.

La liberté de se taire de l’avocat trouve ses limites là où le silence devient mensonge.

L’allégation d’un fait exact comme tel devient mensonge et déloyal lorsqu’on passe sous silence d’autres faits qui annulent ou relativisent les conséquences juridiques du premier. 

En l’espèce, la cour d’appel a considéré à juste titre que le manquement déontologique aux devoirs fondamentaux de la profession constituait en outre une faute civile susceptible d’engager la responsabilité de l’avocat »3.

Jean-Noël BASTENIERE,
Administrateur

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1 G-A. Dal, F. Bruyns, M. Ghislain, X. Grognard, E. Thiry, A. Vergauwen, « La discipline des avocats. Chronique de jurisprudence (2012-2016) » (Seconde partie), J.T., 16 décembre 2017, p. 519

2 Recueil des règles professionnelles 2023, n° 414, p. 414

3 Mons, 16 novembre 2004, J.L.M.B., 2005, page 305 et une note J.-P. BUYLE, « les devoirs de loyauté́ et de probité́ de l’avocat à l’égard de la partie adverse »

A propos de l'auteur

Jean-Noël
Bastenière
Avocat au barreau de Brabant wallon

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