Dans les coulisses du parlement belge - janvier 2025

En attendant qu’un gouvernement de plein exercice soit constitué, la commission de la justice de la Chambre examine une série de propositions de loi et demande des avis. La commission de la justice a également organisé une série d’auditions concernant la dramatique question de la surpopulation carcérale qui ne cesse d’augmenter. La balle est renvoyée au nouveau ministre de la justice qui devra faire face à une situation catastrophique. 


1. Livre 9 du Code civil : « les sûretés personnelles » – audition et avis écrit

a. Textes

b. Développements

AVOCATS.BE était invité à l’audition organisée le 7 janvier 2025 par la commission de la justice de la Chambre des représentants au sujet de la proposition de loi portant le titre 1er "Les sûretés personnelles" du livre 9 "Les sûretés" du Code civil.

Florence George, avocate au barreau de Liège-Huy et Nicholas Ouchinsly, avocat aux barreaux de Bruxelles et du Brabant Wallon ont rédigé l’avis qui a été présenté par Pierre Henry le jour de l’audition.

Dans cet avis, une série de suggestions sont formulées afin d’améliorer le texte.

 

2. Registre successoral – avis écrit

a. Texte

  • Proposition de loi N-VA modifiant le Code civil en vue de la publication, dans le registre central successoral, des données relatives à l'acceptation pure et simple expresse d'une succession par un héritier qui avait préalablement fait une déclaration de renonciation (DOC 56 0419/001)
  • Avis d’AVOCATS.BE

b. Développements

La commission de la justice de la Chambre des représentants a sollicité l’avis d’AVOCATS.BE au sujet de la proposition de loi modifiant le Code civil en vue de la publication, dans le registre central successoral, des données relatives à l'acceptation pure et simple expresse d'une succession par un héritier qui avait préalablement fait une déclaration de renonciation. Cet avis était attendu le 19 décembre 2024.

François Deguel, avocat au barreau de Liège-Huy et membre de la commission « droit de la famille » d’AVOCATS.BE a rédigé cet avis.

La proposition de loi a pour objectif de permettre aux tiers d’avoir les informations exactes. Dans son avis, François Deguel montre en quoi la proposition n’attaint pas son objectif. Il formule une suggestion pour améliorer le texte.

 

3. Présomption de paternité et comaternité pour les cohabitants légaux – avis écrit

a. Textes

b. Développements

La commission de la justice de la Chambre des représentants a sollicité l’avis d’AVOCATS.BE concernant une proposition de loi visant à modifier l'ancien Code civil afin d'étendre la présomption de paternité et de comaternité aux cohabitants légaux. Cet avis était attendu le 19 décembre 2024.

AVOCATS.BE s’est rallié à l’avis rendu à titre personnel par Jean-Louis Renchon, avocats au barreau de Bruxelles et membre de la commission « droit de la famille » d’AVOCATS.BE.

Dans son avis, Jean-Louis Renchon estime que l’objectif de la proposition est légitime : permettre à un enfant né au sein d'un couple de cohabitants légaux de pouvoir bénéficier de plein droit d'un lien de filiation à l'égard de ces deux cohabitants légaux, afin d'éviter que, dans l'hypothèse où cet enfant n'aurait pas pu bénéficier d'une reconnaissance prénatale par son second parent qui serait décédé avant sa naissance, une procédure judiciaire en établissement de ce lien de filiation devrait alors être introduite.

Cependant, la situation envisagée est extrêmement minoritaire et les difficultés qu’engendreraient la solution proposée sont nombreuses. Les inconvénients de la proposition l'emportent donc largement sur l'avantage qui pourrait en être attendu.

 

4. Surpopulation pénitentiaire

  • Auditions à la Chambre

Face à la situation catastrophique dans les prisons, Mathilde Steenbergen, directrice générale des Etablissements pénitentiaires, a demandé d’être entendue en commission de la justice.

Lors de son audition le 11 décembre 2024, elle a insisté pour que soit adoptée une loi d’urgence pendant un an, afin de contrer les effets néfastes de la surpopulation sur les détenus, le personnel et l'infrastructure.

Son audition a été suivie de plusieurs :

Le 17 décembre 2024, ont été entendus :

  • Vincent Spronck, président de l’Association francophone des directeurs de prison;
  • Pieter Van Caeneghem, président de la "Federatie van Vlaamse Gevangenisdirecteurs";
  • Christian De Valkeneer, représentant du Collège des cours et tribunaux;
  • Hildegarde Penne, représentante du Collège des procureurs généraux.

Le 14 janvier 2025, ont été entendus :

  • Grégory Wallez et Robby De Kaey, représentants de la CGSP/ACOD ;
  • Claudine Coupienne et Frank Conings, représentants de la CSC/ACV ;
  • Dimitri Cornu et Eddy De Smedt, représentants du SLFP/VSOA.
  • Olivia Nederlandt, UCLouvain;
  • Tom Daems, KU Leuven;
  • Steven Limbourg, conseiller général, DG Législations, Libertés et Droits fondamentaux, SPF Justice ;
  • Donatien Macquet et Jelle Osselaer, SPF Santé publique.

Les mesures préconisées par Mathilde Steenbergen n’ont pas encore été concrétisées par une proposition de loi. Le rapport des auditions n’a pas encore été publié.

  • Avis du Conseil pénitentiaire sur la surpopulation carcérale

Dans un premier avis, publié le 14 janvier 2025, le Conseil pénitentiaire préconise la mise en œuvre d'un mécanisme de régulation carcérale.

L'instauration d'un mécanisme de régulation carcérale pourrait être pensé selon diverses modalités : interdire les nouvelles entrées quand la limite maximale est atteinte, octroyer des libérations anticipées aux condamnés proches de leur fin de peine ou qui en ont déjà purgé une partie significative, etc.

Pour rappel, le Conseil pénitentiaire existe depuis 2024. Il est présidé par la professeure Marie-Aude Beernaert.

Denis Bosquet est le représentant d’AVOCATS.BE au sein du Conseil pénitentiaire qui ne doit pas être confondu avec le Conseil central de surveillance pénitentiaire.

Alors que le Conseil Central de Surveillance Pénitentiaire (CCSP) a pour mission de contrôler et de faire rapport au Parlement sur le fonctionnement du SPF Justice dans les prisons de manière indépendante de l'exécutif, ainsi que d'organiser les comités indépendants de surveillance et de plainte dans les prisons, le Conseil de politique pénitentiaire a un rôle consultatif à l'égard de l'exécutif. 

 

5. L’élargissement du droit de visite des bâtonniers en prison – question réponse parlementaire

Le ministre de la Justice a été interrogé en commission de la justice le 8 janvier 2025 sur la possibilité d’élargir le droit de visite des bâtonniers en prison à d’autres lieux de détention.

Pour rappel, la loi du 15 mai 2024 permet aux bâtonniers d'avoir accès aux prisons. Les bâtonniers de tout le pays ont exercé ce droit de visite le 10 décembre, jour des droits humains.

La question posée au ministre de la justice était de savoir si ce droit de visite ne pouvait pas être élargi à d'autres lieux de détention, comme les maisons de détention, les centres de psychiatrie légale, les cellules de police et les centres pour personnes en séjour illégal.

Le ministre a répondu que l’élargissement nécessite des modifications législatives et relève en partie de la compétence d'autres départements que celui de la Justice. Il a ajouté qu’il n’était pas convaincu qu’un tel élargissement constituerait une réelle plus-value dès lors que, depuis avril 2024, le Protocole facultatif à la Convention des Nations Unies contre la torture (Optional Protocol to the United Nations Convention against Torture, OPCAT) prévoit déjà d'instaurer des contrôles dans les lieux où des personnes sont privées de leur liberté ».

Le ministre fait référence au mécanisme de prévention de la torture mis en place au sein de l'Institut fédéral des droits humains (IFDH), par la loi du 21 avril 2024.

Le « mécanisme de prévention de la torture », exercé donc par l’IFDH, visite les lieux de privation de liberté qui relèvent de l'État fédéral. Il s'agit non seulement des prisons mais aussi des centres fermés pour migrants et des cellules de police.

Il ne peut par contre pas visiter les lieux qui relèvent de la compétence (partielle) des Régions ou Communautés, comme les institutions publiques fermées pour jeunes et les centres de psychiatrie légale (CPL).

La mise en place d’un mécanisme de prévention de la torture au sein de l’IFDH est évidemment une très bonne chose mais n’empêche pas que les bâtonniers puissent également exercer un droit de visite dans d’autres lieux de détention que les prisons. 

 

6. Rapport de la Cour des comptes sur l'informatisation de la Justice

La Cour des comptes a rendu un rapport « accablant » (selon les termes mêmes du ministre de la justice) sur l’informatisation de la justice.

Dans son rapport, la Cour des comptes constate que la transformation numérique de la justice n’est pas menée de manière satisfaisante et que sa soutenabilité n’est pas garantie. Le SPF Justice ne remplit pas certaines fonctions administratives de base. Par ailleurs, une politique transversale de numérisation au fédéral devrait coordonner les initiatives des départements. La Cour formule des recommandations visant à améliorer la maîtrise et la performance.

Voir le rapport de la Cour des comptes

Voir la synthèse du rapport

Voir le communiqué de presse de la Cour des comptes

Le ministre de la Justice a été assailli de questions lors de la séance de la commission de la Justice du 15 janvier 2025. Les députés N-VA ont demandé que soit organisée une audition de la Cour des comptes en même temps que celle de Vincent Van Quickenborne et celle de l’actuel ministre de la Justice.

 

7. Les projets pilotes en matière d'agenda électronique accessible aux huissiers de justice – question réponse parlementaire

Pierre Jadoul (MR) a interrogé Paul Van Tigchelt en commission de la Justice du 17 décembre 2024 sur les projets pilotes en matière d'agenda électronique accessible aux huissiers de justice.

Pierre Jadoul : « La mise au rôle de procédures judiciaires introduites par la signification d'une citation font l'objet, tant à Hasselt qu'à Anvers, de projets pilotes qui facilitent l'accès des huissiers à l'agenda des audiences afin de procéder à une mise au rôle tenant compte de l'encombrement de la juridiction. Les huissiers semblent satisfaits de ces expériences, qui facilitent la programmation et un meilleur déroulement des audiences. Confirmez-vous l'existence de ces projets pilotes? Une évaluation de ceux-ci a-t-elle déjà eu lieu ou est-elle prévue? Si oui, à quel moment? Généralisera-ton ce modus operandi à toutes les juridictions? À l'instar des huissiers de justice, les cours et tribunaux et les barreaux sont-ils satisfaits de ces expériences? »

Réponse de Paul Van Tigchelt : « Il s'agit d'une initiative du tribunal de première instance et du tribunal de l'entreprise d'Anvers, en collaboration avec la Chambre nationale des huissiers de justice. Cette pratique a mieux réparti les présences aux audiences d'introduction et amélioré l'efficacité des ordres du jour des audiences. Bien qu'il y ait une marge d'amélioration, les tribunaux concernés apprécient généralement le fonctionnement par créneaux horaires. Une évaluation approfondie sera effectuée avant de généraliser ce système ».

Réplique de Pierre Jadoul : « Je me renseignerai plus en profondeur quant à la satisfaction des magistrats et avocats, qui perdaient parfois beaucoup de temps, car il y a là une piste d'amélioration qui ne coûterait pas trop cher ».

A noter que les Ordres sont demandeurs depuis des années du développement d’un agenda électronique des audiences mais ce projet ne progresse pas.

 

Laurence Evrard
Responsable des actualités législatives

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