La Cour constitutionnelle a rendu, le 15 septembre dernier, son arrêt dans le recours (introduit notamment par AVOCATS.BE), en annulation de la loi du 20 décembre 2019, transposant la Directive (EU) 2018/822, relative aux obligations de déclaration des dispositifs transfrontières (DAC6).
La Cour annule l’article 326/7, §3 du CIR 92 (et les articles équivalents dans les autres code fiscaux). Cet article empêchait les professionnels soumis au secret de s’en prévaloir dans le cadre des déclarations périodiques des « dispositifs transfrontières commercialisables » (à savoir les dispositifs qui sont conçus, commercialisés, prêt à être mis en œuvre, ou mis à disposition aux fins de sa mise en œuvre, sans avoir besoin d’être adapté de façon importante). Il semble donc que, pour les dispositifs commercialisables, l’avocat peut se prévaloir de son secret pour ne pas avoir à à procéder aux déclarations, comme c’est le cas pour les dispositifs « particuliers ».
Pour ces dispositifs, l’intermédiaire soumis au secret ne peut se prévaloir de son secret professionnel et ne pas avoir à déclarer le disposition, qu’à la condition qu’il informe les autres intermédiaires (ou, à défaut, le client) qu’il ne peut satisfaire son obligation de déclaration en raison de son secret professionnel.
Des questions préjudicielles ont déjà été soumises à la CJUE (arrêt 167/2020 de la Cour constitutionnelle) dans le cadre du recours contre le Décret flamand transposant DAC6, pour savoir si l’exigence d’une notification aux autres intermédiaires est compatible avec le respect du secret professionnel.
Dans l’attente des réponses à ces questions, la Cour constitutionnelle sursoit à statuer sur les griefs soulevés à ce sujet dans le cadre du recours contre la loi fédérale.
La Cour annule également les dispositions reprises dans les Code des droits d’enregistrement, Code des droits de succession et Code droits et taxes diverses, qui concernent les mesures de contrôles du respect des obligations de déclarations.
La Cour constitutionnelle pose en outre cinq questions préjudicielles à la CJUE, avant de statuer sur une série de griefs, qui portent sur :
- L’extension de l’obligation DAC6 à d’autres matières que l’impôt des sociétés ;
- La clarté et la précision des notions utilisées par la Directive et leur compatibilité avec les principes de légalité, de la sécurité juridique et de la non-rétroactivité des lois ;
- Le moment précis à partir duquel commence à courir le délai de déclaration d’un dispositif ;
- La comptabilité de l’obligation de notifier à un autre intermédiaire l’obligation de déclarer un dispositif, alors que cet autre intermédiaire n’est pas le client du professionnel soumis au secret, avec le respect du secret professionnel ;
- La comptabilité de l’obligation de déclaration des dispositifs transfrontières avec le respect du droit à la vie privé.
Ceci est donc un très bon arrêt de la Cour constitutionnelle, qui a tenu compte de l’argumentaire soulevé dans le recours d’AVOCATS.BE. D’ailleurs, aucun de nos griefs n’est rejeté (la Cour sursoit à statuer sur ces griefs en attendant la réponse de la CJUE) et deux des cinq questions posées à la CJUE sont issues du recours introduit pour l’OBFG (n° 2 et 5).
L’arrêt est disponible ici : https://www.const-court.be/public/f/2022/2022-103f.pdf
Personne de contact : Marjorie Dedryvere (md.juriste@avocats.be)
Pierre Sculier,
Président