De bonnes nouvelles pour le droit collaboratif

La Cour Constitutionnelle rejette le recours en annulation

Plusieurs recours en annulation avaient été introduits, notamment par les assureurs,  à l’encontre de la loi du 18 juin 2018 portant sur les dispositions en vue de promouvoir les formes alternatives de résolution des litiges.

AVOCATS.BE était intervenu dans ces recours et avait déposé deux mémoires très motivés, afin de solliciter, à titre principal, l’irrecevabilité de ceux-ci pour défaut d’intérêt et, à titre subsidiaire, le non-fondement des moyens invoqués.

Quels griefs motivaient ces recours ?

Les requérants poursuivaient entre autres l’annulation des dispositions relatives au droit collaboratif, sur base notamment des moyens suivants :

  • l’exclusivité pour les avocats de l’exercice de ce mode alternatif qui créerait une différence de traitement injustifiée et non proportionnée entre les avocats et les juristes d’entreprises ;
  • l’obligation d’être assisté par un avocat collaboratif pour entreprendre le processus collaboratif et l’obligation de retrait en cas d’échec du processus qui entraineraient une violation du libre choix de l’avocat et du droit au libre exercice de la profession de conseil ;
  • la limitation discriminatoire de la liberté de commerce et d’industrie ainsi que l’entrave à la libre circulation des biens et des services qui résulteraient des dispositions prévues par le législateur.

D’autres griefs concernaient les dispositions relatives à la médiation et notamment la protection légale prévue pour le titre de « médiateur agréé ».

Après avoir examiné la recevabilité des différents recours et rejeté soit totalement soit partiellement certains d’entre eux, la Cour constitutionnelle, dans son arrêt du 24 septembre 2020, a conclu au non-fondement des différents moyens dans une motivation relativement succincte.

Pour ce qui concerne la médiation, la Cour souligne que les conditions à remplir pour obtenir l’agrément en tant que médiateur ne sont pas disproportionnées, et ce d’autant plus que cet agrément n’est pas réservé à un groupe professionnel. 

Pour ce qui concerne le droit collaboratif, et après avoir rappelé le contenu des dispositions légales en la matière, la Cour précise en substance (nous mettons en gras dans le texte):

« Les parties requérantes critiquent le fait que la mise en œuvre du processus de droit collaboratif soit réservée aux avocats (…)  et qu’il soit ainsi porté une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre (…) et au libre choix d’un conseil (…) ;

(…)

La possibilité de mener des négociations collaboratives ne porte pas atteinte aux autres formes de négociation et de médiation, auxquelles d’autres juristes et experts peuvent apporter leur concours. Il en résulte que la réglementation attaquée ne porte pas atteinte à la liberté d’entreprendre de ces juristes et experts. L’obligation, pour les avocats, de suivre une formation pour pouvoir mener des négociations collaborative ne porte pas non plus atteinte à la liberté d’entreprendre.

L’exigence d’un agrément comme avocat collaboratif ne limite pas de manière disproportionnée le droit au libre choix d’un avocat. Tout comme les avocats ont en règle le monopole des plaidoiries (…) afin que le bon fonctionnement des institutions judiciaires soit assurée, les avocats collaboratif ont le monopole pour mener des négociations collaboratives afin que l’efficacité de cette procédure soit assurée.

L’obligation de désistement ne limite pas non plus le droit au libre choix d’un avocat. Une éventuelle confusion du rôle de l’avocat collaboratif et de celui de l’avocat engagé dans une procédure ordinaire compromettrait l’efficacité des négociations. L’obligation de désistement est une application particulière de la règle de déontologie qui interdit à l’avocat d’intervenir lorsque son intervention peut entraîner un conflit d’intérêts. Mis à part l’avocat collaboratif et ses associés, le libre choix d’un avocat est préservé pour le justiciable qui a d’ailleurs adhéré préalablement à la procédure de droit collaboratif. »

La reconnaissance du droit collaboratif, par la Cour Constitutionnelle, comme monopole réservé aux avocats, à l’instar du monopole de plaidoirie, telle que défendue dans le mémoire déposé par AVOCATS.BE, constitue une nouvelle avancée pour ce processus et son déploiement en Belgique. Encore une bonne raison pour les avocats de s’y former[1] et de continuer à le développer dans l’esprit d’équipe qui le caractérise et dans le meilleur intérêt des clients.

 

Anne-Marie Boudart, 
Avocate au barreau de Bruxelles

 

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