Dans les coulisses du parlement belge - avril 2022

Plusieurs avis ont été demandés à AVOCATS.BE concernant des projets législatifs relatifs au secret professionnel de l’avocat, à l’organisation judiciaire, à la procédure judiciaire mais aussi au règlement collectif de dettes.

***

1. Lanceurs d’alerte – secret professionnel

a. Textes

  • Avant-projet de loi relatif à la protection des personnes qui signalent la violation au droit de l’Union ou au droit national constatée au sein d’une entité juridique du secteur privé (non disponible).
  • Avis d’AVOCATS.BE. 

b. Développements

Le ministre de l’Economie a demandé l’avis d’AVOCATS.BE concernant son avant-projet de loi transposant en droit belge la directive 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2019 sur la protection des personnes qui signalent des violations au droit de l’Union.

Conformément à la directive, l’avant-projet de loi exclut du champ d’application de la loi les informations couvertes par le secret professionnel de l’avocat. 

L’avant-projet de loi va cependant beaucoup plus loin en proposant une définition de ce secret professionnel.

AVOCATS.BE considère qu’il n’y a pas lieu définir le secret professionnel de l’avocat et surtout pas dans une loi particulière qui n’est pas consacrée au secret professionnel. 

AVOCATS.BE relève d’ailleurs que la Directive ne définit pas le secret professionnel des avocats, ni n’impose de le définir.


2. Collecte et conservation des données – secret professionnel

a. Textes

  • Projet de loi relatif à la collecte et à la conservation des données d’identification et des métadonnées dans le secteur des communications électroniques et à la fourniture de ces données aux autorités, n° 2572/001
  • Avis d’AVOCATS.BE 

b. Développements

La commission de l’Economie de la Chambre des représentants a sollicité l’avis d’AVOCATS.BE concernant le nouveau projet de loi du gouvernement concernant la conservation des données.

Rappelons que les deux précédentes lois ont été annulées à la suite de recours introduits notamment par AVOCATS.BE. Le conseil d’AVOCATS.BE dans ces recours était Jean-François Henrotte, avocat au barreau de Liège – Huy et membre de la commission informatique d’AVOCATS.BE. C’est lui qui a rédigé l’avis d’AVOCATS.BE.   

Dans son avis, AVOCATS.BE déplore que le texte ne respecte que très partiellement le secret professionnel.

Le texte ne protège en effet que les communications émanant de l’avocat ou du médecin et nullement celles qui leur sont passées par leurs patients ou clients ! C’est pourtant ce sens de communication qui le plus préjudiciable pour le secret professionnel puisqu’il indique aux autorités que le client a téléphoné à son conseil et quand.


3. Modification de l’article 186 du Code judiciaire – règlement de répartition

a. Textes

  • Avant-projet de modification de l’article 186 du Code judiciaire (non disponible).
  • Avis d’AVOCATS.BE 

b. Développements

Le ministre de la justice a demandé l’avis d’AVOCATS.BE concernant son nouveau projet de modification de l’article 186 du Code judiciaire (règlement de répartition). 

L’avis a été préparé par Michel Kaiser et Céline Jadot, avocats au barreau de Bruxelles. Michel Kaiser est par ailleurs co-président de la commission de droit public d’AVOCATS.BE et conseil d’AVOCATS.BE dans un recours contre un règlement de répartition. Ce recours a donné lieu à une question préjudicielle posée à la Cour constitutionnelle mais qui n’a pas encore reçu de réponse. 

Pour rappel, l’actuel article 186, § 1er du Code judiciaire a été substantiellement modifié suite à l’adoption de la loi du 1er décembre 2013 portant réforme des arrondissements judiciaires et modifiant le Code judiciaire en vue de renforcer la mobilité des membres de l'ordre judiciaire. Cette disposition habilite le Roi à attribuer à une ou plusieurs divisions, une compétence exclusive pour le traitement de certaines catégories d'affaires, par l’adoption d’un règlement de répartition des affaires. 

L’avant-projet de modification de l’article 186 soumis à AVOCATS.BE vise à octroyer encore beaucoup plus de flexibilité au chef de corps pour proposer au Roi de déroger à l’organisation légale et naturelle du service de la justice.

Le texte permet notamment de « centraliser au sein d’une ou plusieurs division(s) certaines étapes procédurales, telles que les audiences d’introduction ou les audiences devant les chambres du conseil (par exemple au sein de la division où est située la prison) », et ce à nouveau dans « une logique de rationalisation et d’efficience », et en vue de « rédui[re] les coûts liés à la sécurité des bâtiments et du transport ».

Le nouveau dispositif permet également l’adoption d’un règlement de répartition des affaires au niveau du « ressort » d’une cour d’appel ou d’une cour du travail.

Contrairement au projet précédent, l’avant-projet ne permet plus de supprimer des lieux d’audience existants et ne supprime plus les listes limitatives des affaires civiles et pénales pouvant être concentrées dans une seule division – ce qui avait été critiqué- mais les complète. 

Toutefois, si le principe de la non-suppression des lieux d’audience est finalement conservé dans le texte en projet, l’exposé des motifs laisse clairement entrevoir la possibilité de faire de certains lieux d’audience de « coquilles vides », notamment en fusionnant divisions et greffes. En ce sens, l’énoncé du souhait que « l’accès au greffe reste garanti pour chaque citoyen » semble assez formel.

Pa ailleurs, en étendant de manière extrêmement large et quasi-illimitée, la liste de ces matières exceptionnelles, l’avant-projet de loi balaye cette garantie fondamentale que constitue des listes nécessairement limitatives pouvant faire l’objet d’un regroupement en une division unique (voire plusieurs) d’une même juridiction.

A noter également que le nouveau projet d’article 186 prévoit la possibilité de déroger au cadre.

L’avis d’AVOCATS.BE est très critique et considère que l’avant-projet d’article porte une atteinte grave à l’accès à la justice et aux garanties du procès équitable, à la protection de l’environnement (par une mobilité raisonnée) ainsi qu’à la présence symbolique d’une justice efficiente (à travers notamment ses lieux de justice)

 

4. Calcul du revenu mensuel insaisissable dans le cadre du règlement collectif de dettes 

a. Textes

  • Proposition de loi Vooruit modifiant le Code judiciaire en vue de l'application de budgets de référence lors du calcul du revenu mensuel insaisissable dans le cadre du règlement collectif de dettes (DOC55 2502).
  • Avis d’AVOCATS.BE 

b. Développements

La commission de la Justice  de la Chambre des représentants  a entamé l’examen de la proposition de loi modifiant le Code judiciaire en vue de l'application de budgets de référence lors du calcul du revenu mensuel insaisissable dans le cadre du règlement collectif de dettes, et ont invité AVOCATS.BE à participer à une audition et qui aura lieu le mardi 26 avril 2022.

Stéphane Gothot, avocat au barreau de Liège - Huy et ancien administrateur d’AVOCATS.BE, a représenté AVOCATS.BE lors de cette audition.  

L’objectif de la proposition de loi est de remplacer la méthode de fixation actuelle du pécule de médiation au cas par cas par un calcul basé sur des budgets de référence. 

Le constat du groupe de travail « règlement collectif de dettes » est que ce projet est à mille lieux de la réalité de terrain. La dignité humaine ne se met pas en formule, elle s’appréhende, pour chaque cas, en fonction de la situation personnelle et familiale de la personne surendettée. De plus, ses contours sont en perpétuel changement suivant l’évolution de notre société.

Dans le cadre du règlement collectif de dettes, AVOCATS.BE considère que c’est sur la base des informations précises recueillies par le médiateur de dettes auprès du médié, qu’il est possible de déterminer de manière plus juste le montant du pécule de médiation dont le surendetté et son ménage ont besoin pour vivre dignement. 

Si le législateur estime devoir encadrer plus strictement ce travail, et tout en estimant que l’immense majorité des médiateurs de dettes l’accomplit de manière adéquate, AVOCATS.BE propose d’adapter le texte de loi actuel en vue de renforcer le contrôle du juge durant cette phase amiable et d’imposer aux médiateurs d’être davantage à l’écoute de la personne surendettée.


5. Modification de l’article 805 du Code judiciaire en ce qui concerne le défaut 

a. Textes

b. Développements

La commission de la Justice de la Chambre des représentants a sollicité l’avis d’AVOCATS.BE concernant la proposition de loi modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne le défaut.

La proposition vise à permettre le rabat du défaut « au cours de la première audience suivant celle où le défaut a été prononcé ».

Antoine Gillet, avocat au barreau du Brabant wallon et membre de la commission de droit et pratique judiciaires d’AVOCATS.BE a préparé un avis qui témoigne de la perplexité de la commission de droit et pratique judiciaires par rapport à la proposition.

Si le jugement a été prononcé, il est difficile de concevoir qu’il puisse encore être rabattu.

Le dispositif proposé s’apparente donc davantage à une sorte de voie de recours soumise au bon vouloir de la partie comparante.

Laurence Evrard, 
Responsable des actualités législatives

Crédit photo : Oakenchips, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons

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Laurence
Evrard
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